Les Gamins des Lumières

Traduction officielle du Chapitre 4 de la série « The Story of Us » du blog Wait But Why par Tim Urban.

Ceci est le Chapitre 4 d’une série. Si vous découvrez la série, visitez la page d’accueil de celle-ci pour une table des matières complète.

Partie 2 : Les Jeux de Valeur

« Nous avons besoin d’un gouvernement, hélas, à cause de la nature humaine. » – PJ O’Rourke

Chapitre 4 : Les Gamins des Lumières

Nos ancêtres américains maîtrisaient parfaitement les « Power Games » (Jeux de Pouvoir).

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Cette scène en particulier ne sortait pas vraiment de l’ordinaire. C’était un développement typique des Jeux de Pouvoir, où la plupart des nations de l’époque étaient pris dans le tourbillon « tyrannie → coup d’état → chaos → tyrannie ».

Les Pères Fondateurs en avaient marre de la tyrannie et décidèrent qu’il était temps de passer au stade coup d’État – ou bien, dans ce cas-ci, au stade cousin et moins intense du coup d’État, le mouvement pour l’indépendance.

Ce qui était inhabituel était leur plan à long terme. Normalement, les gens se rebellent parce qu’ils sont soûlés d’être impuissants et qu’ils veulent renverser la situation. Alors une rébellion renverse le roi, un chaos s’ensuit, des amis assassinent des amis, et une fois que le calme revenu, il y a un nouveau roi. Pendant des siècles, la plupart des gens ont supposé que c’était ainsi que les choses devaient se passer. Mais nous étions à la fin des années 1700 et les Pères Fondateurs étaient des « Enlightenment Kids » (Gamins des Lumières).

Pendant le Siècle des Lumières, des « Higher Minds » (Esprits Supérieurs) de certaines parties de l’Europe avaient commencé à parler avec prudence d’une nouvelle histoire.

La nouvelle histoire parlait d’idées telles que les droits humains, l’égalité, la tolérance et la liberté. D’après cette nouvelle histoire, les humains avaient fait des progrès incroyables dans les domaines de la connaissance, de la sagesse et de la technologie – mais ils continuaient à gouverner comme s’ils étaient en 7 000 ans av J.-C. Selon cette histoire, les Jeux de Pouvoir étaient désagréables, injustes, non productifs et inutiles – et ils étaient fondamentalement immoraux, violant les éléments les plus sacrés de ce que « être un humain » signifiait.

Cette histoire était un virus de l’esprit, tout comme d’autres histoires – et elle commença à se propager.

Peu de temps après, elle traversa l’Atlantique et s’imposa dans toutes les colonies américaines, transformant les sujets anglais bien élevés – de bonnes cellules du géant anglais mondial – en enfants des Lumières. Les enfants des Lumières étaient les « millenials » (la génération Y) de leur époque. Très vite, les habitants de toutes les colonies commencèrent à se dire qu’ils avaient des droits – et ces droits n’étaient pas respectés.

Les Pères Fondateurs américains arrivèrent à l’âge adulte au beau milieu de tout cela et décidèrent de passer à l’action. Ils avaient de plus grandes ambitions que de renverser leur roi – ils voulaient renverser le concept même de roi.

Ils écrivirent ainsi une lettre au roi George III pour expliquer la nouvelle situation.

Le cours des événements ne furent pas du tout au goût du Roi George, si bien que les Britanniques entrèrent en guerre. George Washington, âgé de 44 ans se retrouva à devoir les repousser, ce qui, de manière assez burlesque, énerva énormément sa mère.1

Mais George ne laissa pas ce désaccord l’empêcher, avec son équipe et l’aide de la France bien trop contente d’intervenir, de résister aux Britanniques jusqu’à ce qu’ils cèdent et soient finalement repoussés de l’autre côté de l’océan.

Les Américains avaient ainsi gagné leur indépendance, et pour la première fois, un groupe d’enfants des Lumières se retrouvèrent avec une occasion rare : une possibilité de créer une nouvelle sorte de pays, en repartant de zéro – une possibilité d’écrire cette pièce « voici ce que je ferais si je pouvais créer mon propre pays » et d’en jouer la représentation « pour de vrai ». Il était temps de mettre les Lumières à l’épreuve.

Il y allait avoir du pain sur la planche.

Concevoir le Géant Amérique

Une grande partie de ce qui suit semblera peut-être aujourd’hui intuitif aux lecteurs. Mais lorsque les États-Unis sont nés, aucun pays dans le monde n’était ce que nous considérerions aujourd’hui comme une démocratie – ces idées étaient donc tout sauf des évidences. C’est notamment ce qui fait que la construction des États-Unis est un exploit si impressionnant.

Une partie de la complexité de tout ceci réside dans le fait qu’une nation se situe simultanément à différents endroits de la Tour de l’Émergence. Dans le cas des États-Unis, cela fonctionnerait à peu près comme ceci :[footnote2]Les villes et les comtés peuvent être un peu déroutants aux États-Unis (surtout si vous n’êtes pas américains !) et ils fonctionnent différemment selon les États – mais c’est une état de fait assez standard.[/footnote2]

Les Pères Fondateurs ont pensé à chacun de ces niveaux lorsqu’ils ont conçu le pays.

Tout d’abord, il y avait ce qui était peut-être le plus important : l’individu « citoyen américain ». Alors que les dictatures issues des Jeux de Pouvoir traitaient souvent leur population comme une simple ressource à exploiter pour atteindre des objectifs nationaux et au-delà des frontières, les Lumières étaient très centrées sur le côté sacré de l’individu. Quoi qu’il arrive, les droits individuels devaient être protégés.

La Boîte Bleue « Posons clairement les choses une bonne fois pour toutes »

« Quoiqu’il arrive, les droits individuels doivent être protégés » est l’une des nombreuses phrases de ce billet qui pourrait paraître ridicule sans une astérisque qui souligne ou sous-tend le fait ironique qu’un pays fondé sur l’égalité, la liberté et la capacité à s’élever a également longtemps considéré que ces doctrines ne pouvaient s’appliquer qu’à certains groupes de personnes, tout en en traitant d’autres comme du bétail, des sauvages inférieurs, des accessoires ménagers, etc.

Les États-Unis ne constituent pas une émanation parfaite des valeurs fondamentales déclarées à sa naissance ni de son intention fondatrice – un fait au cœur de la plupart des conflits d’aujourd’hui, et qui le fut tout au long de l’histoire du pays. Nous allons nous y plonger plus tard dans la série. Pour le moment, mettons-nous tous d’accord sur ce qu’était l’intention première. Ce chapitre nous aidera à construire le langage que nous utiliserons plus tard pour parler de choses plus délicates.

La Boîte Bleue « Bon okay, tant qu’on y est, autant dégager ça aussi du chemin »

Cette partie de la série, ainsi que d’autres parties plus tard, sont très centrées sur les États-Unis. La raison est que je suis américain et que je suis actuellement plongé dans la société américaine. Je comprends donc beaucoup mieux les États-Unis qu’aucun autre pays.

Mais je parie que même dans les sections de la série consacrées aux États-Unis, la plupart des idées correspondent assez bien à l’endroit où vous vivez. Selon Google Analytics, 58% des lecteurs de WBW sont américains et 42% viennent d’autres pays. Toutefois, en creusant un peu, on s’est rendus compte que la plupart des lecteurs de WBW vivent dans des démocraties2 :

Ainsi, pour la plupart des non-Américains, vous pouvez baser votre réflexion sur votre propre version de tout cela. En ce qui concerne les 8% restants (pourcentage probablement plus élevé en raison de l’utilisation du VPN), j’espère que vous partagerez vos points de vue avec le reste d’entre nous – ils contribueront à brosser un tableau plus précis du spectre complet des sociétés humaines modernes.

Revenons maintenant au paragraphe situé au-dessus de ces deux boîtes bleues pour ne pas oublier ce dont nous parlions avant cette digression.

Plus précisément, les fondateurs se sont inspirés du concept fondamental des Lumières – les droits inaliénables – qu’ils ont formulés dans la phrase la plus célèbre de l’histoire américaine :

Nous tenons pour évidentes les vérités suivantes : tous les hommes sont créés égaux ; ils sont doués par le Créateur de certains Droits inaliénables – parmi ces droits figurent la Vie, la Liberté et la poursuite du Bonheur.3

Tout au long de l’histoire de l’humanité, il a souvent été considéré comme acquis que certains étaient dotés de dons délivrés par Dieu, et d’autres non – que ce soit parce qu’ils provenaient d’une certaine famille, d’un certain groupe démographique, ou étaient supposés être favorisés par le dieu en vogue. Les penseurs des Lumières trouvaient cela stupide. Ils considéraient que les droits inaliénables s’appliquaient intrinsèquement à tous de manière égale et qu’ils existaient au-delà du domaine politique.

Plus haut sur la Tour de l’Émergence, les Pères Fondateurs ont essayé d’atteindre le juste équilibre entre les couches concurrentes de différents géants. Le grand géant américain était composé de ce qui deviendrait plus tard 50 géants d’États plus petits, chacun étant composés à son tour de géants encore plus petits, comme les comtés et les villes. Les concepteurs se sont lancés dans des débats endiablés sur les types de pouvoirs dont devraient disposer chaque niveau de géant, et jusqu’où irait l’autonomie dont disposeraient les plus petits géants par rapport à l’obligation de se soumettre aux ordres venant d’en haut. Les débats font rage, même encore aujourd’hui.

Nous défricherons tout ça plus tard dans un autre article. Pour le moment, nous allons nous concentrer sur le grand géant américain situé tout en haut de la Tour d’Émergence des USA.

L’intérieur des États-Unis aurait pu être l’utopie parfaite des Lumières, mais le monde extérieur jouait toujours aux Jeux de Pouvoir, et si le géant américain n’était pas capable de jouer sur le même tableau, l’expérience risquait d’être de courte durée. Le géant américain devrait être fort, économiquement et militairement, et prendre des décisions judicieuses sur le paysage mondial.

Les fondateurs pensaient pouvoir satisfaire à la fois les préoccupations individuelles et nationales, à condition de mettre en place les bonnes lois. Mais cela a introduit un nouveau problème :

Qui serait en charge de faire appliquer les lois? Et qui aurait la capacité de prendre des décisions affectant tout le pays?

Si le pays avait pu être dirigé par un dictateur parfaitement honnête, désintéressé, plein de principes, cohérent, non renversable, immortel et éternel – alors, bien sûr, ce dirigeant mythique aurait pu faire appliquer les lois et prendre les décisions pour toujours.

En l’absence d’un tel dirigeant, comment les États-Unis éviteraient-ils le destin de tout Jeux de Pouvoir, où soit le premier dictateur, soit l’un de ses successeurs, devient corrompu, et commence à tordre et enfreindre les lois et à tout faire partir en sucette ?

Les fondateurs avaient un plan. Ils prendraient le dictateur standard —

— et le diviseraient en trois parties (à ne pas confondre avec les trois branches du gouvernement).

La première partie serait constituée des règles du dictateur, qui dans ce cas ne découleraient de l’esprit d’aucun dirigeant, mais des Lumières elles-mêmes. Les fondateurs collaboreraient pour créer une version sur mesure de la philosophie des Lumières et l’exposer dans un document sacré appelé Constitution.

Dans les jeux de pouvoir, les rois, les empereurs et les chefs de guerre poursuivaient, en général, un ensemble d’objectifs : prospérité personnelle ou nationale, défense contre d’autres géants, expansion territoriale, etc. Il s’agissait des objectifs sacrés des dirigeants qu’ils essayaient d’atteindre par tous les moyens. Les règles qu’ils utilisaient afin de gouverner étaient généralement considérées comme faisant partie de ces moyens – définies de manière stratégique, afin de soutenir les objectifs sacrés. Lorsque deux valeurs entrent en conflit, c’est celle qui est considérée comme plus sacrée qui reste fermement en place, tandis que l’autre tend vers la première, via quelques compromis.

La Constitution américaine fonctionnerait à l’inverse. C’était un ensemble de règles qui, au lieu de servir un objectif ou un résultat particulier, seraient sacrées en elles-mêmes. La Constitution décrivait un processus sacré – un ensemble de moyens inviolables grâce auxquels tout objectif national ou individuel doit être atteint. Elle décrivait les moyens par lesquels les dirigeants seraient élus, les moyens par lesquels les conflits seraient réglés et les personnes qui enfreindraient les règles punies, et finalement les moyens par lesquels le pays pourrait influencer la scène internationale – tous les processus issus des valeurs des Lumières. Les États-Unis et leurs citoyens pouvaient et feraient tout ce qu’ils voulaient, à condition de le faire à la manière des Lumières.

En centrant le nouveau pays autour d’un processus sacré, les fondateurs américains ont complètement renversé l’ordre normal des choses.

La deuxième partie du dictateur américain – le cerveau qui décide à la fois de ce qui se passe à l’intérieur du pays et de ce que le pays fait sur la scène internationale – serait gérée par le corps de citoyens.

Les citoyens seraient en mesure de prendre toutes les décisions qu’ils souhaitent, à condition de respecter les règles sacrées. Il y aurait même des parties des règles que le corps citoyen pourrait décider de modifier – certaines lois, jurisprudences, ou amendements à la Constitution – mais même ces changements de règles ne pourraient se produire qu’en suivant des voies tracées par d’autres parties des règles. Bien entendu, à un niveau plus restreint, les politiciens seraient en charge de la prise de décision nationale, mais sur le long terme, les élections signifie donc que c’est le corps du citoyen qui mène la danse.4

 
La dernière « division » du dictateur serait son gourdin – la main de fer qui fait respecter les règles, et fait en sorte que tout se fonctionne comme il se doit. Ce serait le travail du gouvernement américain.

Une grande partie des règles de la Constitution se rapporterait au champ d’action et aux limites du gouvernement. L’idée était que le gouvernement ne ferait pas les règles, il serait soumis aux règles. Le gouvernement ne serait pas le principal moteur de l’évolution et de la direction du pays – il se contenterait, en théorie, d’exécuter la volonté du peuple à mesure de son évolution. Avec un monopole sur l’usage de la violence, le gouvernement serait le grand responsable de l’application de la loi, mais son utilisation de la force serait sévèrement limitée au-delà de cet objectif.

Si les États-Unis étaient un match de football, la Constitution serait la règle du jeu, les citoyens seraient les joueurs sur le terrain, et le gouvernement serait l’arbitre. En un sens, l’arbitre est impuissant – totalement lié par le règlement, il est incapable de contrôler le résultat du match. Mais dans un autre sens, l’arbitre est immensément puissant, car chaque fois que des règles sont enfreintes, l’arbitre peut sortir son carton rouge et envoyer des personnes en prison.

Les Fondateurs ne pouvaient pas concevoir un dictateur mythique, immortel et ambitieux, mais ils pouvaient concevoir chacune de ses parties qui, ensemble, pouvaient durer éternellement, rester cohérents, et finalement accomplir la même chose.

Pour une espèce qui, par nature, joue aux Jeux de Pouvoir, ce système avait une ambition remarquable : mettre le Primitive Mind collectif du pays dans une cage, et laisser aux Higher Minds l’espace nécessaire pour décider de la manière dont les choses se devraient se passer.

Avec ce plan en tête, les ancêtres ont commencé à concevoir les détails du règlement – en commençant par une préoccupation à l’esprit de chaque citoyen :

Liberté

L’un des pires aspects de la vie dans les Jeux de Pouvoir était le manque de liberté. La plupart des gens vivaient leur vie à la merci du gourdin de quelqu’un d’autre. Mais c’est en fait un symptôme du problème réel des Jeux de Pouvoir : trop de liberté.

Dans les Jeux de Pouvoir, tout le monde commence avec une liberté illimitée.

Donc, avant que quoi que ce soit n’arrive, l’environnement des Jeux de Pouvoir ressemble à ça :

Une barre de liberté totale pour chaque personne. Ça paraît super – jusqu’à ce que des conflits surgissent et que la règle directrice des Jeux de Pouvoir entre en jeu :

Chacun peut faire ce qu’il veut, s’il a le pouvoir de le faire.

Sans aucun principe en vigueur, les Jeux de Pouvoir sont un simple concours de qui se trouve être le plus grand tyran. Dans la plupart des cas, quel que soit le pouvoir dont vous disposez, il existe quelqu’un quelque part avec un gourdin encore plus gros – et il l’utilisera généralement pour restreindre une partie de votre liberté illimitée, que cela vous plaise ou non.

En fonction de qui est l’intimidateur environnant et de ce qu’il ressent pour vous, vous pouvez risquer de vous retrouver pratiquement sans liberté.

C’est pourquoi l’environnement typique des Jeux de Pouvoir compte quelques gagnants en terme de liberté, et beaucoup, beaucoup de perdants en terme de liberté. Cela ressemble davantage à ceci :

les États-Unis ont été fondés, avant tout, en réaction au problème de liberté des Jeux de Pouvoir – un problème que la Constitution résout avec un compromis qui ressemble à ceci :

Chacun peut faire ce qu’il veut, tant que cela ne nuit à personne d’autre.

Plus simplement :[footnote2]Tant la formulation exacte de cette charmante citation que l’identité de l’orateur sont contestés.[/footnote2]

Votre droit à faire valdinguer vos poings dans tous les sens se termine là où commence le nez d’une autre personne.

En échange de l’abandon de la liberté de nuire ou d’intimider les autres, vous pourriez mener une vie entièrement à l’abri de toute personne qui vous intimiderait. Plutôt un bon deal, non ? Aux États-Unis, personne ne serait totalement libre, mais tout le monde le serait plutôt :

Ce compromis comporte deux points. La première partie – chacun peut faire ce qu’il veut décrit ce que les citoyens peuvent faire. Leurs droits. La deuxième partie – tant que cela ne nuit à personne d’autre décrit ce que les citoyens ne peuvent pas faire. Leurs restrictions.

Les deux sont mutuellement exclusifs : décider que les citoyens ne devraient pas être la cible de certaines choses, c’est aussi décider qu’ils ne devraient ne pas être libres de les faire. De même, chaque liberté accordée aux citoyens est une chose que les citoyens devront concéder avec autrui. Voilà pourquoi « liberté » aux États-Unis n‘est pas tant la liberté qu’un compromis liberté-sécurité. Et dans ce compromis, le mot clé – préjudice est l’élément décisif. En ce qui concerne la Constitution, une action est principalement jugée sur la base du critère préjudice : si elle est préjudiciable, les citoyens doivent en être protégés ; si elle ne l’est pas, c’est un droit qui doit lui-même être protégé.

J’aime y voir deux cercles entourant chaque citoyen américain : un cercle rouge de sécurité et un cercle vert de droits.

Le cercle vert d’une personne offre une liberté énorme, dont peu de personne peuvent jouir intégralement dans les Jeux de Pouvoir – mais dès lors que l’on envahit le cercle rouge de quelqu’un d’autre, le gouvernement se voit obligé d’intervenir, car la loi est enfreinte.

La Constitution oblige le gouvernement à s’acquitter de ses obligations de protection du cercle rouge. Mais la protection des cercles verts constituait tout autant une préoccupation. Le gouvernement serait obligé de protéger le cercle vert de droits de chaque citoyen contre toute atteinte illégale par des citoyens malhonnêtes et, surtout, par le gouvernement lui-même.

Dans son célèbre ouvrage philosophique intitulé On Liberty, John Stuart Mill, appelle ce concept Principe du Tort, en ces termes :[footnote2]John Stuart Mill, On Liberty (PDF)[/footnote2]

La seule raison légitime que puisse avoir une société pour user de la force contre un de ses membres est de l’empêcher de nuire aux autres.

Pour s’assurer que tout était encore plus clair que de l’eau de roche, les Fondateurs ont rajouté dix amendements à la constitution originale – la Déclaration des droits des États-Unis (United States Bill of Rights) – qui énonçaient notamment le type d’empiétements classiques du cercle vert des Jeux de Pouvoir contre lesquels le gouvernement serait expressément interdit d’intervenir. Le plus remarquable des dix est le Premier Amendement, qui protégeait les droits classiques des Lumières tels que la liberté d’expression, la liberté de religion, la liberté de la presse et la liberté de réunion.

Les Fondateurs accordaient également une grande importance à la propriété, à tel point qu’ils donnèrent aux propriétaires un pouvoir particulier qu’ils pouvaient exercer dans les limites de leur propre propriété. Ce pouvoir leur permettrait de traiter leur propriété comme un mini pays, où ils pourraient appliquer les règles de leur choix, à condition de ne pas franchir la frontière du préjudice. En d’autres termes, le cercle rouge d’une personne serait protégé partout à l’intérieur des frontières des États-Unis, quelle que soit la propriété sur laquelle il se trouvait – mais le cercle vert d’une personne ne serait garanti que dans les lieux publics ou sur sa propre propriété privée. Cela signifie que pour chaque citoyen américain, les États-Unis sont divisés en trois types d’espace, chacun avec son propre niveau de droits :

Lorsque vous êtes conviés à ma fête, ou que vous travaillez dans mon entreprise, ou que vous passez du temps dans mon restaurant, ou que vous commentez mon site, j’ai le droit de vous mettre à la porte si vous dites quelque chose que je n’aime pas, si vous portez quelque chose que je n’aime pas, ou si je décide simplement que je ne vous aime pas. Si vous contestez ma capacité à le faire, je peux appeler la police et elle me soutiendra – car c’est vous qui violez les règles, pas moi.5

Mais dès que je vous agresse physiquement, que je vous kidnappe, ou que je fais je fais quoi que ce soit qui relève de la définition de « préjudice » du gouvernement, il n’y a plus de débat – la police est maintenant de votre côté.

Mais pour que les États-Unis fonctionnent, ils ne pouvaient pas se contenter d’être simplement un pays libre – ils devaient être un pays juste.

Équité

« Un pays juste » signifie deux trois trucs. [footnote2]Jolie synthèse des catégories d’équité ci-dessous dans le chapitre 11 du livre de Jonathan Haidt et Greg Lukianoff, The Coddling of the American Mind.[/footnote2]

Une composante importante est l’équité procédurière les personnes sont-elles traitées de la même manière en vertu de la loi, et sont-elles toutes soumises aux mêmes procédures ? Un exemple classique est le système judiciaire.

Lorsqu’une personne enfreint la loi ou lorsqu’il y a un conflit entre citoyens, l’arbitre du gouvernement doit s’assurer qu’il distribue les cartons jaunes et rouges de manière conforme et uniforme. Même lorsque tout le monde essaie d’être aussi juste que possible, cela peut être délicat.

D’une part, la ligne qui sépare ce qui est légal de ce qui ne l’est pas se dessine autour du concept général de préjudice. Ce qui signifie que…

… n’est souvent pas aussi clair et net que dans mon dessin. La ligne de préjudice n’est pas toujours précise – la plupart du temps, la question de savoir si préjudice il y a eu pendant un conflit est plus floue et plus ambiguë :

Ensuite, il y a le fait que les droits du cercle vert d’une personne se heurtent régulièrement aux cercles verts d’autres personnes (comme une manifestation interférant avec un défilé public), et il n’est pas toujours évident de savoir lequel de ces droits doit primer sur les autres.

Pour rendre les choses encore plus difficiles, les gens ne disent pas toujours la vérité, et le gouvernement traite souvent la parole d’une personne contre celle d’une autre sans preuve concrète dans un sens ou dans l’autre.

Les Fondateurs ont donc créé un système de justice qui permet à toute personne en conflit ou accusée d’un crime de raconter sa version des faits à d’autres citoyens, qui peuvent alors décider qui est en tort et pour quoi. Les Jeux de Pouvoir sont pleins de gens qui sont reconnus coupables sans preuves et punis injustement, ce à quoi les Lumières étaient déterminées à mettre fin – ainsi la règle d’or serait : présomption d’innocence jusqu’à preuve du contraire.

Les Fondateurs savaient également qu’au fur et à mesure de l’évolution de la société, de nouvelles industries avec de nouvelles technologies seraient développées, ce qui entraînerait de nouveaux domaines de droits et de nouveaux types de préjudices – de sorte que le système judiciaire appliquerait l’esprit de la Constitution à des situations inconnues, au fur et à mesure qu’elles se présenteraient, créant ainsi de nouvelles jurisprudences.

L’autre composante majeure d’un pays équitable est l’équité distributive.

Les humains aiment les ressources, et les ressources sont limitées. Dans les Jeux de Pouvoir, celui qui détient le gourdin a tendance à distribuer les ressources de la manière qu’il juge la plus appropriée. Dans les nouveaux États-Unis, il n’en était pas question.

Mais si personne au sommet ne décidait qui obtient quoi, qui le ferait ?

Dans la première partie, j’ai comparé le fait d’être né dans une dictature des Jeux de Pouvoir au fait de piocher dans un paquet de cartes :

Si vous piochiez un valet de cœur et étiez né enfant de noble dans l’une des castes supérieures présumées du dictateur, vous pouviez potentiellement mener une vie prospère et agréable. Mais la plupart du temps, on se retrouvait avec le 7 de trèfle et on passait sa vie de paysan dans la mouise, ou bien on tirait un 4 de carreau et on se retrouvait esclave pendant 40 dures années, voire on tombait sur un 2 de pique et on se retrouvait balancé à l’étranger, à 13 ans, suites aux délocalisations de Monsieur Point d’Interrogation, et la messe était dite. 

Les cercles de liberté rouge et vert ont partiellement résolu ce problème en supprimant, au moins pour les citoyens, les types d’oppression les plus flagrants qui constituent les cartes les plus basses – ce qui signifie que les citoyens américains seraient assurés de ne pas détenir moins que, disons, une valeur en dessous de 7. Pour déterminer comment les cartes sont distribuées au-delà de ce minimum, le pays aurait besoin d’un système adéquat de distribution des ressources.

Pour grossir exagérément le trait, considérons les options de distribution des ressources d’un pays sur un spectre linéaire qui ne manquera pas de me faire tomber sur le râble d’un bon paquet d’entre vous :

Nous pouvons transposer notre métaphore du match de foot sur le diagramme, où les citoyens sont les joueurs, et le gouvernement est l’arbitre :6

La plupart d’entre nous peuvent convenir que la moitié droite de ce spectre – où les ressources sont distribuées arbitrairement, selon les caprices d’un dictateur – est un système injuste, qui se traduit généralement par une large classe marginalisée, avec peu d’espoir de mobilité ascendante.

Mais l’un des débats mondiaux les plus haletants du siècle dernier a porté sur la question de savoir où se situe la véritable forme d’équité dans la moitié gauche du spectre.

Les Pères Fondateurs ont favorisé la partie médiane du spectre – libre échange et égalité des chances – sur l’extrémité gauche. Ils pensaient que sur le terrain de foot, tout le monde devait avoir une chance égale de jouer, mais qu’au-delà de cela, la façon dont les gens jouaient devait déterminer leur sort dans la vie. La notion « d’égalité des chances » est ancrée dans le troisième droit inaliénable : la poursuite du bonheur. Un droit à cette quête est ce qui comptait pour les Américains – la poursuite du bonheur, de la richesse, du pouvoir, de l’influence – et non un droit à l’acquisition de ces ressources.

Mais il s’agit d’un spectre, pas d’un choix entre deux options binaires – et la position exacte de l’endroit où les États-Unis se trouvent et devraient se trouver dans la partie gauche du spectre fait l’objet d’un débat à l’intérieur du pays depuis sa fondation. L’idée générale, cependant, est que les Fondateurs ont choisi l’égalité des chances plutôt que l’égalité des résultats.

Ils considéraient l’égalité des chances comme intuitivement juste. D’accord, un tel système produirait des gagnants et des perdants en matière de ressources – et tout le monde ne serait pas content de ses résultats – mais ils pensaient que si les gens avaient le sentiment que les chances étaient égales, ils auraient également le sentiment que les résultats obtenus étaient justes.

Les Fondateurs étaient également très attachés à la liberté. Tout système d’équité qui se ferait au détriment de trop de liberté serait donc irrecevable.

Si nous ajoutons un axe 𝑦 « contrôle gouvernemental » à notre axe d’égalité, nous pouvons voir comment cela a probablement alimenté la réflexion.

L’idée générale est que plus on s’éloigne du centre de l’axe de l’égalité, plus le contrôle gouvernemental est nécessaire pour générer le résultat d’égalité (ou d’inégalité) qui l’accompagne – ce qui signifie que le système de distribution d’un pays se situera probablement quelque part le long de ce « V » :

L’insistance des Fondateurs sur la liberté individuelle et l’ordre public restreint les parties supérieures et inférieures du carré :

Et comme nous l’avons vu plus haut, le principe de l’égalité des chances efface aussi la moitié droite de l’axe 𝑥 des abscisses.

Si l’on ajoute notre « V », on comprend pourquoi les Fondateurs ont atterri à cet endroit sur l’axe de l’égalité :

Une répartition parfaitement équitable des ressources qui garantirait à chaque citoyen une vie égale avec des ressources égales serait trop coûteuse en termes de liberté – cela signifierait que ce que vous faites dans votre vie n’a aucune incidence sur le déroulement de celle-ci. Dans cette situation, les résultats de votre vie seraient plutôt déterminés par le gouvernement – ce qui est en contradiction totale avec la pensée des Lumières. Là encore, les Fondateurs sont parvenus à un compromis.

En rassemblant tout cela, nous obtenons une petite fenêtre à l’intérieur du grand carré qui constitue la zone américaine :

La zone américaine n’est pas un point unique, c’est une forme, avec une hauteur et une largeur – il y aurait donc encore beaucoup de sujets sur lesquelles les citoyens, les philosophes et les politiciens pourraient se disputer. Mais toute la gamme d’arguments serait limitée à ces limites.

La raison pour laquelle beaucoup de gens m’houspilleront à propos de ces graphiques est qu’ils ne voient généralement pas leurs adversaires politiques comme étant simplement nichés dans le coin opposé de cette zone américaine. Au contraire, les gens ont tendance à croire que leurs ennemis politiques font l’apologie de toutes sortes de Jeux de Pouvoir horribles dans les zones – le capitalisme prédateur, les excès du gouvernement, la discrimination institutionnelle, etc. Et dans certains cas, c’est le cas. Nous reviendrons sur tout cela plus tard dans la série. Ce que nous examinons ici, c’est l’esprit qui se cache derrière la façon dont les Fondateurs ont conçu le système – ou du moins ce en quoi cet esprit a évolué jusqu’à aujourd’hui.

Il y avait un autre argument en faveur des marchés libres et de l’égalité des chances – un qui dépassait le domaine de la moralité. Les Fondateurs ont prédit que l’égalité des chances produirait un formidable effet secondaire : une fantastique productivité. Un système dans lequel tout le monde aurait la possibilité de rivaliser pour les ressources générerait une alternative complète aux Jeux de Pouvoir – ce que nous pourrions appeler les « Value Games » (Jeux de Valeur).

Les Jeux de Valeur

Dans les Jeux de Pouvoir, les gens qui possèdent un gourdin les utilisent pour prendre de force les ressources qu’ils désirent. Dans les Jeux de Valeur, les gens utilisent des carottes pour soutirer des ressources aux autres.

Les Jeux de Valeurs sont motivés par la nature humaine, tout comme les Jeux de Pouvoir. La différence est que les Jeux de Pouvoir sont ce que les humains font lorsqu’il n’y a pas de règles – les jeux de valeur sont ce que les humains font lorsqu’une limitation essentielle est ajoutée à leur environnement :

Vous ne pouvez pas utiliser de gourdin pour obtenir ce que vous voulez.

Si je veux quelque chose que vous avez, mais que je n’ai pas le droit de l’obtenir en vous brutalisant, alors la seule option qui me reste est de vous demander de me le donner volontairement. Mais comme toi aussi, tu es un gros égoïste, la seule façon d’y parvenir est que je me pointe avec une « carotte » – un truc valeureux que je peux t’offrir – qu’il te serait préférable d’avoir, comparativement à la ressource que j’attends de toi. Si j’arrive à trouver cette carotte, tu seras super content de faire l’échange, et j’obtiendrais ma ressource. Dans les Jeux de Pouvoir à somme nulle, le tyran gagne et le martyr perd. Dans les Jeux de Valeur à somme positive, en retirant l’intimidation de l’équation, les deux parties peuvent parvenir à une transaction pour chacun s’y retrouver.

Faisons appel à notre équation du comportement, sous une forme simplifiée.

 

Les Jeux de Valeur sont un exemple classique de manipulation de l’environnement afin de modifier les comportements. Le fait de supprimer les brimades des options de jeu – ou plutôt d’ajouter des sanctions suffisamment sévères pour que les brimades deviennent une stratégie indésirable – change tout. On passe d’un jeu où l’on concourt pour savoir qui peut être le plus effrayant, le plus dangereux et le plus intimidant, à un concours pour savoir qui peut produire les meilleures carottes – qui peut apporter le plus de valeur à ses chers concitoyens.

Deux exemples évidents :

Dans les Jeux de Valeur économiques – comprendre capitalisme – Tout citoyen peut se battre pour la richesse. Mais pour l’acquérir, il doit trouver le moyen de fournir une forme de carotte que les autres citoyens veulent suffisamment s’arracher pour tirer son épingle du jeu. Ainsi, par exemple, n’importe qui peut postuler à un emploi ou créer une entreprise – mais pour que votre quête de richesse se transforme réellement en richesse, il faut que vos employeurs ou vos clients soient prêt à échanger leur richesse contre la valeur que vous pouvez leur apporter. Et pour que votre richesse soit durable, il vaudrait mieux pour vous que la carotte ait bon goût, et pas seulement qu’elle n’ait qu’une belle forme ou une une jolie couleur. Votre promesse de valeur devra se vérifier lorsqu’elle sera testée – faute de quoi, vous serez rapidement licencié, ou la réputation de votre entreprise se détériorera.

Dans les Jeux de Valeur politiques – comprendre démocratie – tout citoyen peut se présenter aux élections et se battre pour obtenir le pouvoir d’allouer les ressources gouvernementales à ce qu’il désire. Mais pour acquérir réellement ce pouvoir, vous devez convaincre les autres citoyens de vous accorder le siège en gagnant suffisamment de voix pour remporter une élection. Et pour conserver le pouvoir pendant longtemps, vous devrez utiliser le vôtre de manière à satisfaire suffisamment de citoyens pour être continuellement réélu. Si les carottes que vous avez promises pendant la campagne n’ont jamais fini d’arriver, les électeurs ne vous donneront probablement pas le pouvoir que vous souhaitez la fois suivante. 

Sans les bonnes lois, l’égoïsme humain échappe à tout contrôle et reprend inévitablement le dessus, c’est pourquoi le Primitive Mind domine les Jeux de Pouvoir. Mais les Jeux de Valeur renversent la situation pour notre Primitive Mind, le forçant à respecter les règles des Lumières ou à finir en prison.

Alors qu’il était généralement préférable d’être craint plutôt qu’aimé dans les Jeux de Pouvoir, dans les Jeux de Valeur, il est généralement préférable d’être aimé plutôt que craint – ce qui permet aux politiciens et aux entreprises de se comporter au mieux.

Et un bon comportement n’était que la cerise sur le gâteau. Les Fondateurs croyaient que le fait de mettre le Primitive Mind aux commandes de la Constitution transformerait le feu intérieur délétère de l’égoïsme humain en une machine à vapeur inépuisable, autorégulatrice et automotrice.

Au quotidien, les Jeux de Valeur auraient pour objectif une meilleure qualité de vie autoréalisatrice. Comme le dit Adam Smith, icône des Lumières[footnote2]The Wealth Of Nations, Livre I, Chapitre II, pp. 26-7, paragraphe 12[/footnote2] :

« Ce n’est pas de la bonté du boucher, du brasseur ou du boulanger que nous attendons notre dîner, mais de leur considération pour leur propre intérêt. »

Sur le long terme, les confrontations de la compétition des Jeux de Valeur décocheraient une flèche foudroyante de progrès et de prospérité, qui viendrait se planter tout droit, en plein cœur d’une cible au profit de tous les Américains.

Les Jeux de Pouvoir feraient bien plus que de déterminer qui vivrait le destin d’un 8, d’un 9, d’un 10, d’un J, d’une Q, d’un K, ou d’un As…

 

Les avantages à long terme des Jeux de Pouvoir élèveraient l’ensemble, au point où l’Américain moyen du futur vivrait une vie bien plus confortable et agréable que la plus haute couche de la population de la fin du XVIIIe siècle.7

Mais le marché libre le plus cool dans les Jeux de Valeur ne serait ni économique ni politique, ce serait le jeu des idées – le jeu qui donnerait un cerveau au géant américain.

Si nous voulons atteindre notre objectif dans cette série – comprendre ce qui se passe dans la société américaine et chez les autres – nous allons devoir apprendre à être des neuroscientifiques dans le monde des géants et nous faire une idée de la façon dont une société pense. C’est ce que nous verrons dans le prochain chapitre.


  1. Les historiens ne sont pas formel, mais la tradition veut qu'elle était une loyaliste convaincue, opposée à la politique révolutionnaire de George. Prenez également connaissance de l'histoire hilarante – peut-être fausse – que j'ai trouvée ici, durant la guerre avec la France et l'Inde, où la mère de Washington lui écrivait une lettre pour se plaindre qu'elle avait besoin de plus de beurre. George était là du genre : « Putain mais bordel maman. » Pourquoi est-ce qu’on a gaspillé autant de temps sur la légende du cerisier, alors que la légende de la « mère qui la fout mal » était juste là sous nos yeux pendant tout ce temps.

  2. Les classifications des gouvernements sont basées sur les statistiques de « l’Index de Démocratie » de l'Economist Intelligence Unit – voici leurs données sur une carte.

  3. Ils ont emprunté cette terminologie à John Locke, à la différence près qu'ils ont changé « propriété » dans sa formulation par « poursuite du bonheur » – preuve supplémentaire qu'ils étaient la génération Y du XVIIIème siècle.

  4. La question de savoir si les choses se passent vraiment de cette manière dans une démocratie est un autre sujet de débat. Le livre de John Medearis Deux théories de la Démocratie de Joseph Schumpeter affirme par exemple l'idée que les citoyens dirigent le spectacle est une illusion.

  5. Dans certaines situations, comme au sein d'une entreprise, le gouvernement peut restreindre une partie du pouvoir décisionnel du propriétaire – en interdisant, par exemple, la discrimination – mais même ces restrictions sont souvent politiquement controversées.

  6. Aujourd'hui, un grand argument en faveur de la redistribution réside dans la correction de l'injustice systématique. Ce type de correction relèverait en fait de la catégorie intermédiaire ci-dessous, dans laquelle l'arbitre ne garantit que le fair-play, car un véritable match de football sur l'égalité des chances inclurait déjà ces corrections (et ne pas les corriger signifierait que le système est en fait à droite du centre). Les débats modernes sur ce type de corrections ne portent généralement pas sur la place que nous devrions occuper sur l'axe de l'égalité – il porte sur l'injustice systématique constatée. Nous reviendrons sur ce sujet plus tard dans la série, mais il semble utile de le mentionner au passage.

  7. Nous en avons tous discuté, une fois, à la « Dinner Table » Wait But Why. La question était : Vaut-il mieux être né monarque français en 1700, ou être une personne ordinaire aujourd'hui ? Nombre de réponses intéressantes.

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