L’Échelle de la Réflexion

Traduction officielle du Chapitre 7 de la série « The Story of Us » du blog Wait But Why par Tim Urban.

Ceci est le Chapitre 7 d’une série. Si vous découvrez la série, visitez la page d’accueil de celle-ci pour une table des matières complète.

Partie 3 : Penser, en 3D

« Le problème de ce monde, c’est que les idiots et les fanatiques sont toujours sûrs d’eux, tandis que les sages sont toujours pleins de doutes.  » – Bertrand Russell

Chapitre 7 : L'échelle de la Réflexion

Pourquoi croyons-nous ce que nous croyons ?

On a parlé de plein de trucs dans cette série jusqu’à présent, et l’un des thèmes qui revient souvent est la croyance humaine. Nos croyances constituent notre perception de la réalité, elles déterminent notre comportement et façonnent nos existences. L’Histoire qu’on connaît est la conséquences des croyances de l’époque, et ce que nous croyons aujourd’hui écrira l’Histoire du futur.

Il semble donc important de se poser la question suivante : pourquoi en arrivons-nous à croire ce que nous croyons ?

Pour le savoir, il va falloir apprendre à se représenter la pensée humaine en 3D. Lorsque vous aurez terminé la Troisième Partie, vous verrez où je veux en venir.

Pour l’instant, habituons-nous à la voir en 2D. C’est notre mission dans ce chapitre.

Voir en 2D

La première des dimensions qu’on définit est le Quoi de la vie. C’est ce que nous voyons autour de nous, ce qui se passe dans la société, ce que les gens disent et font, ce qu’ils croient.

Tout percevoir en une seule dimension nous permet simplement de voir en surface les aspects de la réalité. Mais lorsqu’on regarde sous le tapis du « Quoi » de la vie, on réalise qu’il y a aussi une deuxième dimension à tout.

Pour voir en 2D, nous allons avoir besoin de lunettes X-Ray Vision (vision à rayons X) :

Sans ces lunettes, on regarderait un humain, et on verrait ça :

C’est à cela que ressemble un humain en une dimension.  C’est le Quoi d’un humain, qui englobe tous les aspects de son comportement, de ses croyances et de sa personnalité.

Mais quand on met nos lunettes, on regarde le même humain, et on voit ça :

De nombreux mystères du monde humain deviennent beaucoup moins mystérieux avec ces lunettes à rayons X. Avec notre vision à rayons X, nous pouvons voir la psychologie interne qui se cache dans les coulisses de tout Quoi humain.

Petit rappel :

Comme nous l’avons vu au Chapitre 1, le monde animal est en réalité un monde de  codes génétiques en quête perpétuelle d’immortalité. Les animaux sont simplement des conteneurs biologiques que les gènes utilisent comme hôtes temporaires pour accomplir leur quête. Et pour contrôler ces conteneurs, les gènes font fonctionner leurs animaux via des logiciels automatisés primitifs qui, j’en suis sûr, ressemblent beaucoup à celui-ci :

L’Esprit Primitif de chaque animal – humains compris – a été optimisé à la quasi perfection pour que les animaux puissent survivre assez longtemps pour transmettre leurs précieux gènes dans de nouveaux réceptacles.

Les scientifiques ne sont pas formels quant à la chronologie, mais beaucoup pensent que tous les humains de toutes les régions du monde ont vécu dans des tribus de chasseurs-cueilleurs environ 11 000 ans avant Jésus-Christ. Il y a donc 13 000 ans – ou, si l’on considère qu’une génération dure 25 ans, il y a environ 500 générations.

500 générations, c’est pas assez de temps qu’il en faudrait à l’évolution pour aller aux chiottes. Ainsi, le Primitive Mind (l’Esprit Primitif) – un de nos câblages interne – est toujours coincé 11 000 ans avant J.C. Ça veut dire qu’on est un peu tous comme des ordinateurs tournant sous le système d’exploitation Windows version 11 000 avant J.-C. super pas du tout impressionnant, et il n’y a pas moyen de mettre à jour le logiciel.

Mais d’autres trucs se passent chez les humains pendant ce temps là – la combinaison de super pouvoirs cognitifs en un centre de conscience amélioré, que nous appelons le Higher Mind (Esprit Supérieur).

Le Higher Mind et ses capacités de réflexion surnaturelles ont permis à l’espèce humaine de transformer son monde animal habituel de chasseurs-cueilleurs en ce qui se trouve être indubitablement un écosystème des plus étranges : une civilisation avancée. La conscience accrue de ce Higher Mind lui permet de voir le monde avec clairvoyance, de se comporter de façon rationnelle dans n’importe quel environnement, et de s’adapter aux changements en temps réel.

Donc pendant que nos Primitive Minds sont encore quelque part en 11 000 avant J.-C., nos Higher Minds vivent ici même avec nous en 2019. Ce qui explique pourquoi, même si les deux esprits essaient simplement de faire leur boulot, ils se bagarrent la plupart du temps.

Parfois, les bagarres portent sur ce qui est le mieux pour nous – un conflit pratique.

 

Ce genre de bagarres là se produisent lorsque les deux esprits s’entendent sur ce qui est important – c’est-à-dire qu’ils partagent des valeurs communes – mais qu’ils n’arrivent pas à se mettre d’accord sur la meilleure façon d’y arriver. Lorsque vous êtes tiraillé à l’idée de vous empiffrer de Skittles ou pas, vos deux esprits sont tout à fait en accord avec l’importance capitale de prioriser sur la santé physique. Mais en 11 000 avant J.-C., où vit votre Primitive Mind, les aliments transformés n’existaient pas, les calories étaient une rareté, et n’importe quoi ayant une texture et un goût aussi délectables qu’un Skittle promettait un riche apport en calories. En d’autres termes, tout indique au Primitive Mind que manger des Skittles est la décision la plus saine possible. Votre Higher Mind, qui vit en 2019, est totalement conscient que manger 145 Skittles d’une traite n’est pas bon pour votre santé. D’où votre conflit intérieur.

 

Ce même genre de conflits pratiques peuvent aussi mener à de nombreuses bagarres à propos de nos craintes.

Parfois, les désaccords sont plus fondamentaux.

Un tel conflit survient lorsque les deux esprits sont en désaccord sur ce qui est important à la base – un conflit de valeurs. Un conflit de valeurs se produit lorsque le Higher Mind s’oppose moralement à ce que le Primitive Mind est programmé à vouloir. Comme, disons, la façon dont le Primitive Mind a la fâcheuse tendance à vouloir refourguer sa précieuse cargaison génétique à une variété aussi grande que possible de nouveaux conteneurs, au détriment de valeurs comme la gentillesse, la civilité, le professionnalisme, ou la fidélité conjugale. Un conflit de valeurs intérieur a lieu chaque fois que vous faites scrupuleusement face à vos états d’âme ou à une lutte pour votre intégrité.

Il existe également un conflit de valeurs inverse – lorsque le Higher Mind valorise quelque chose pour lequel le Primitive Mind est spécifiquement programmé à résister. Comme, par exemple, participer aux travaux ménagers, ou faire un don à une œuvre caritative.

Les humains sont si compliqués pour une raison simple : nous sommes chacun le produit d’une lutte entre deux forces fondamentalement différentes, souvent en contradiction.

Ce combat permanent du feu et de la lumière est comme une lutte acharnée incessante dans nos têtes – un tir à la corde concernant nos pensées, nos émotions, nos valeurs, notre morale, nos jugements et notre conscience globale.

Lorsque nous regardons à travers nos lunettes à rayons X quelqu’un dont le Higher Mind est, en ce moment, aux manettes, nous voyons ceci :

Avec un Higher Mind proéminent en parfait contrôle, le Primitive Mind fait toujours des histoires, mais le Higher Mind tire sur sa laisse comme un maître promènerait son chien.

Mais lorsque l’équilibre des pouvoirs bascule de l’autre côté, le Primitive Mind est comme un animal échappé du zoo.

Ce jeu du tir à la corde n’est pas binaire, c’est un spectre. Appelons ça le Spectre Psychique.

On peut considérer le Spectre Psychique comme ça :

Le Primitive Mind vit toujours tout en bas du Spectre Psychique, à la base du niveau psychologique humain. Le Higher Mind vit toujours au sommet, à l’apogée du potentiel psychologique humain évolué.

Votre position sur ce spectre à un instant t est déterminée par l’état de la lutte interne entre les deux esprits.

Quand vous êtes haut placé sur le Spectre Psychique, vous êtes au top niveau. Le Higher Mind comprend que les plaisirs primitifs comme le sexe, la nourriture, et le tribalisme tout-puissant comme le fanatisme sportif sont des aspects géniaux, et souvent nécessaires, de la vie humaine. Et comme un bon propriétaire d’animal de compagnie, Le Higher Mind est plus qu’heureux de laisser le Primitive Mind s’amuser. Le bonheur primitif est formidable, tant qu’il est géré par le Higher Mind, qui veille à ce que cela soit fait avec modération, pour les bonnes raisons, et que personne ne soit blessé.

Lorsque nous sommes en bas du Spectre Psychique, nous sommes myopes, nous avons l’esprit étroit, nous pensons et agissons avec nos émotions les plus mesquines et notre ego, nous manquons de conscience de soi, nous manquons de compassion, nous sommes hypocrites – et parce que le Primitive Mind est un logiciel inconscient, nous sommes généralement trop dans le brouillard pour constater notre attitude pour ce qu’elle est ; c’est-à-dire merdique.

Notre position sur le Spectre Psychique fluctue chaque jour, chaque mois et chaque année de notre vie, au fur et à mesure que nous traversons des moments heureux et des épisodes difficiles, des jours merveilleux et d’autres horribles, de la bonne humeur et des attitudes grincheuses. Même une seule mauvaise nuit de sommeil a le potentiel de nous faire descendre dans le spectre le jour suivant. Mais si nous pouvions quantifier tous nous différents états, nous obtiendrions une moyenne générale. Nous pouvons appeler cette moyenne notre « équilibre psychique ». Tout au long de notre vie, cet équilibre peut changer à mesure que nous grandissons et évoluons psychologiquement.

La Boîte bleue Adultes et Matures

Faisons une distinction linguistique importante : la différence entre ce que signifie être un adulte et ce que signifie être mature.  Pour nos besoins, « adulte » se réfère à notre âge physique, tandis que « mature » se réfère à notre âge psychologique. Un adulte est vieux. Une personne mature est sage.

Chacun de nous accumule de la sagesse avec l’expérience de la vie, mais ce n’est que lorsque notre Higher Mind est celui qui réfléchit que nous pouvons puiser dans cette sagesse. Lorsque notre volonté et notre conscience succombent aux logiciels anciens, nous retournons à la pire version de nous-mêmes.

Alors que le cheminement physique de l’enfant à l’adulte est linéaire, régulier et le même pour tous, le cheminement vers le haut de ce Spectre Psychique est différent pour chacun d’entre nous. C’est pourquoi nous connaissons tous beaucoup d’adultes un peu gamins, ainsi que des enfants étonnamment matures.

 

Contrairement à notre âge physique, la sagesse n’est pas uniformément répartie en nous – nous avons tous des pans de notre vie où nous sommes relativement matures, et d’autres où nous avons tendance à lutter. Nos écarts de sagesse – les parties de notre vie où nous avons tendance à être moins matures que nous sommes adultes – sont les domaines où nous sommes psychologiquement à la ramasse.

Donc la question n’est pas de savoir si vous êtes psychologiquement à la ramasse – la question est où ?

Évidemment, comme pour tout ce qui est psychologique, je suis sûr que la nature joue un grand rôle, et que, dès la naissance, nous étions tous déjà sujets à certains retards de croissance psychologique, selon notre profil génétique. Mais l’éducation est sans aucun doute à l’origine de beaucoup de nos luttes sur le Spectre Psychique. Je ne suis pas psychologue, mais en pensant à mon propre esprit et à celui des gens que je connais bien, quelques coupables probables me viennent à l’esprit :

 

1) Les domaines de la vie où vos parents sont à la ramasse. Vous savez comme parfois vous avez l’impression que vos parents sont carrément sages dans la vie et vous les admirez pour cela, alors que d’autres fois vous ne pouvez pas croire à quel point ils peuvent être si déraisonnables et vous avez l’impression que c’est vous qui devez les élever eux ? C’est parce que la sagesse est inégalement répartie chez vos parents aussi – ils sont à la ramasse comme tout le monde, ils traversent la même lutte interne. Et le fait est que les mêmes zones où l’on est psychologiquement à la ramasse est souvent contagieux au sein d’une famille – vous êtes probablement à la bourre dans plusieurs des mêmes domaines où vos parents vous rendent fou. C’est juste plus difficile à voir en soi-même parce que cela peut se manifester d’une autre façon et parce qu’il est généralement plus difficile de voir nos propres défauts que ceux des autres.

 

Une des raisons pour laquelle ces zones psychologiquement à la ramasse se diffusent au sein d’une famille, est que les enfants ne sont pas élevés par leurs parents – ils sont élevés par les Higher Minds de leurs parents et par les Primitive Minds de leurs parents. Dans les domaines de la vie où vos parents ont tendance à être sages, vous avez probablement été élevé principalement par un Higher Mind. Vous avez donc appris à aborder cette partie de la vie avec votre Higher Mind aux manettes, et généralement cette habitude perdure.

 

D’un autre côté, les parties de la vie où l’un de vos parents est un bébé, vous avez été élevé par… un bébé. Dans ces domaines là de la vie, vos parents n’avaient pas encore la maîtrise de leur propre Primitive Mind, et vous avez donc été élevé par un Primitive Mind plutôt que par un Higher Mind.

S’il y a bien une chose qu’un Primitive Mind sait faire, c’est utiliser des émotions primaires comme la peur ou la fierté pour faire péter un cable aux Primitive Minds des autres. Le fait de penser à un domaine de la vie sous le prisme de votre Primitive Mind devient aussi une habitude – une habitude que les gens peuvent passer leur vie à essayer de rompre, parfois sans succès. Partout où vos parents étaient craintifs, peu intègres, mesquins, snobs, vantards, jaloux, cruels, sans compassion, peu sûrs d’eux, égoïstes, délirants ou toute autre forme de bêtise – ces zones deviendront vos défis psychologiques dans la vie. Ce sont dans ces domaines là que vous partez d’un point de départ psychologiques primaires et sous-développés, et pour lesquels vous devrez y allouer votre énergie et votre attention pour essayer de grandir.

2) Les domaines de la vie où votre Primitive Mind a subi un traumatisme. Si, à un moment quelconque dans votre vie, vous avez été intimidé, négligé, honteux, ridiculisé, trahi, exclu, abandonné, discriminé, avez eu le cœur brisé ou été profondément déçu, votre Primitive Mind a traversé l’enfer. Des expériences comme celles-ci sont gravées dans la mémoire du Primitive Mind, et si vous n’avez jamais complètement digéré ce qui s’est passé, le traumatisme restera une blessure ouverte dans votre psyché. Le traumatisme de votre Primitive Mind est une blessure que seul le Higher Mind peut désinfecter, apaiser et commencer à guérir. Et jusqu’à ce que cela se produise, la précédente version de vous-même – vous, à l’âge que vous aviez au moment du traumatisme – vous hantera comme un fantôme. Comme, par exemple, si vous étiez socialement exclu au collège et que vous n’avez jamais digéré correctement ce cauchemar. Ce sera 20 ans plus tard et à la seule allusion au fait d’être exclu d’un groupe dans n’importe quelle situation que vous allez vous effondrez intérieurement et vous vous trouverez à agir comme un enfant. Le collégien traumatisé se réveillera et prendra le contrôle, ramenant votre âge psychologique à l’époque du collège. Les blessures du passé non digérées sont des points vulnérables dans votre psyché qui vous rendent prédisposés à tomber sous le contrôle inconscient du Primitive Mind.

 

3) Les domaines de la vie où votre environnement actuel alimente votre Primitive Mind. Votre environnement actuel est constitué de tous les endroits où vous passez du temps, de toutes les personnes avec lesquelles vous collaborez et du flux d’information qui entre dans votre cerveau en provenance du monde extérieur. Votre environnement s’impose constamment à vous, et vice versa : lorsque vous parlez ou vous exprimez de quelque façon que ce soit, votre environnement réagit. Cette friction constante entre vous et votre environnement peut avoir toutes sortes d’effets sur vous, sur une échelle allant d’effets très positifs, à neutres, à très négatifs. Et certaines parties de cette relation avec votre environnement alimenteront inévitablement votre Primitive Mind – un lieu de travail où circule des rumeurs, un site d’actualité empreint de tribalisme, une amitié malsaine, et beaucoup d’autres éléments de notre environnement qui peuvent régulièrement nous tirer vers le bas du Spectre Psychique.

 

L’éducation, les traumatismes et l’environnement ne couvrent pas parfaitement tous ces aspects, mais ma propre expérience me dit qu’ils correspondent assez bien à notre checklist psychologique du « je-travaille-là-dessus ».

Le défi du développement humain est décrit, pour chacun d’entre nous, par notre liste personnelle de zones à problèmes sur notre Spectre Psychique. Cette liste est la raison pour laquelle la vie sera difficile. Ce pourquoi nous allons blesser les autres. Ce pourquoi nous avons des regrets. Ce qui se trouve entre nous et la vie que nous savons que nous devrions vivre. Et c’est une liste que nous transmettrons directement à nos enfants (si ce n’est pas déjà fait), à moins que nous ne menions une remise en question continue et un travail acharné pour nous « élever nous-même » dans les domaines où nos parents n’ont pas pu le faire.

La plupart des problèmes chez les humains peuvent se résumer à des Primitive Mind incontrôlés qui obtiennent ce qu’ils veulent en opposition au meilleur jugement du Higher Mind. C’est ce qui se cache derrière la procrastination chronique, les troubles de l’alimentation, les crises de colère, l’infidélité, les agressions sexuelles et toutes les autres choses terribles que les humains se font à eux-mêmes et aux autres. À l’époque des chasseurs-cueilleurs, le Primitive Mind était au poil – mais dans le monde moderne, c’est notre maladie mentale collective. Et personne n’en est à l’abri.

Revenons à nos moutons. Donc une grande partie de nos problèmes actuels découlent de la simplification excessive de phénomènes complexes dans nos discussions. Penser au monde réel en une seule dimension est généralement une mauvaise idée.

Par exemple, l’opulence en une seule dimension ressemble à ceci.

 

Si vous voulez blâmer quelqu’un pour les maux de la société, et que vous n’avez qu’une seule dimension pour ce faire, il vous reste l’option peu judicieuse de blâmer les riches, de blâmer les pauvres, de blâmer les deux, ou de ne blâmer ni l’un ni l’autre.

Mais je suis tombé sur ce petit visuel récemment :

Ce visuel nous supplie d’ajouter une deuxième dimension à notre pensée unidimensionnelle. Cela revient à prendre le spectre de l’opulence et de l’agrandir (avec les axes intervertis) en quelque chose comme ça :

Que vous soyez d’accord ou non avec le point de vue présenté dans cet autre visuel, l’ajout d’une deuxième dimension nous permet d’avoir une discussion beaucoup plus nuancée à ce sujet.

Pour le reste de cette série, nous allons appliquer une deuxième dimension spécifique à tout ce dont nous parlons : le Spectre Psychique.

Le plus dur, c’est que nous avons tous été entraînés à ne penser qu’en une seule dimension – dans la dimension « Quoi ». Nous examinons le comportement des gens, leurs paroles, leurs inclinaisons, leurs habitudes, leurs comportements, leurs dispositions – et nous nous arrêtons là. Le Spectre Psychique ajoute une deuxième dimension critique à l’équation en se demandant pourquoi les gens agissent comme ils le font. Quand un caissier est grossier avec vous, vous pouvez regarder la situation en une dimension, le juger et penser que c’est un connard et vous arrêter là. Ou bien vous pouvez mettre vos lunettes à rayons X, voir que son Primitive Mind tire clairement les ficelles dans sa tête, et vous demander pourquoi. Quand vous regardez les choses en 2D, ça n’a pas de sens de détester les gens qui disent ou font des choses merdiques, parce que ça n’a pas de sens de détester les anciens logiciels de survie préprogrammés qui les poussent à agir de la sorte. En 2D, vous voyez quelqu’un qui se comporte comme un trou du cul est en fait dans « les mains de Lucifer »«  » – un démon que vous connaissez bien, en vous regardant en 2D, dans les mains duquel vous savez parfois vous trouver vous aussi.

Une fois que vous aurez intégré cette deuxième dimension dans votre manière de penser, vous remarquerez que vous commencerez à l’utiliser partout ailleurs. Nous l’avons déjà testé plusieurs fois sur ce blog.1Il est maintenant temps d’introduire cette deuxième dimension dans le monde de la croyance humaine, pour nous aider à répondre à cette question clé : Pourquoi croyons-nous ce que nous croyons ?

La bataille concernant nos Croyances

En une dimension, notre panel de croyances ressemble à ceci :

Le Spectre des Idées – le même que celui avec lequel nous avons passé tant de temps dans les deux derniers chapitres – est utile lorsque vous voulez simplement explorer ce que les gens pensent. Cela a suffi dans la Partie 2, lorsque nous avons parlé de façon générale du marché des idées et de la façon dont toute une nation d’Américains peut collectivement arriver à une conclusion, et comment cette conclusion peut évoluer au fil du temps. Mais comme nous le verrons dans cet article, c’est loin d’être une vision complète.

Le Spectre des Idées est l’axe de « Ce que tu penses ». Et c’est une information importante, mais la valeur de ce que l’on pense dépend entièrement de la façon avec laquelle on en est arrivé à cette croyance au départ.

C’est là que la seconde dimension entre en jeu. Lorsqu’il s’agit de la façon dont nous pensons et dont nous formons nos croyances, le Spectre Psychique est notre axe « Comment tu penses ».

L’ajout du Spectre Psychique transforme notre spectre de pensée en un carré de pensée – et notre discussion peut maintenant devenir intéressante.

Le processus de base que nous examinons est la formation des croyances, que nous pouvons annoter comme ceci :

Dans notre carré de pensée, la position en abscisse d’une personne nous montre où elle a atterri au point B – le résultat de son processus de réflexion. Leur position sur l’axe des y nous renseigne sur le type de progression qui les a menés là – sur le processus et la justification de ce qu’ils croient.

Notre position sur l’axe des y est le résultat de l’état de notre tension interne, donc la première question que nous devons nous poser est : comment les deux esprits pensent-ils ?

Comment les deux esprits pensent

De la même façon que nos points de vue intellectuels sont fonction de notre processus intellectuel, notre processus intellectuel est fonction de notre motivation intellectuelle. Nous pensons comme nous pensons d’abord parce que cela sert nos objectifs.

Notre motivation intellectuelle reflète normalement nos valeurs – ou, plus précisément, la façon dont nous priorisons nos valeurs. La plupart d’entre nous accordent de l’importance à la fois à la santé et à la gastronomie, mais c’est la valeur qui a le plus de poids dans notre tête à ce moment-là qui détermine si nous faisons ou non une razzia sur les Skittles. C’est comme si nos valeurs étaient disposées dans notre tête comme une Pile de Valeurs.

Tout en haut de la pile se trouvent les valeurs que nous tenons pour sacrées, et à mesure que nous descendons dans la pile, nous accordons de moins en moins d’importance à chaque valeur. Chaque fois que deux valeurs sont en conflit, la plus basse sera celle qui devra faire un compromis, tandis que la plus haute ne bougera pas d’un poil.

Bien sûr, le Higher Mind et Primitive Mind ne sont pas du tout d’accord sur ce à quoi doit ressembler votre Pile de Valeurs.

Quand il s’agit de votre vie intellectuelle, le Higher Mind valorise la vérité par-dessus tout. La mission intellectuelle du Higher Mind est de mener vos croyances – votre perception de la réalité – aussi près que possible de la réalité réelle.

C’est sa mission parce que la force du Higher Mind tout entier est nourrie uniquement par la vérité. C’est une corrélation directe : plus le Higher Mind a accès à la vérité, plus sa lumière est brillante et plus vous êtes une personne sage.

Étant donné cette mission, et la compréhension qu’elle est incroyablement difficile et sans fin – il est juste rationnel pour le Higher Mind d’être complètement humble quant à sa perception de la réalité à tout moment et totalement détaché des idées qui composent cette perception. Il voit les croyances comme rien de plus que la dernière ébauche d’un travail éternellement en cours, et tout au long de sa vie et de ses apprentissages, rien ne rend le Higher Mind plus heureux qu’une chance de réviser cette ébauche inévitablement imparfaite. Parce que lorsque les croyances sont réévaluées, c’est un signe de progrès – de devenir moins ignorant, moins fou, moins délirant. Un changement d’avis sur quelque chose est signe que sa lumière devient plus brillante – et c’est tout ce qui compte pour le Higher Mind.

Et le Primitive Mind, alors ?

Il est intuitif de savoir pourquoi le Primitive Mind s’opposerait à la fidélité conjugale -– mais quel est son problème avec l’approche des croyances du Higher Mind ? La vérité n’est-elle pas utile à sa mission de survie des gènes ?

En fait, non, ça ne l’est pas. La vérité n’est pas pertinente pour le Primitive Mind.

Les croyances du Primitive Mind sont typiquement installées dans son système dès le début de la vie, un peu comme la façon dont les réglages de notre système immunitaire sont initialement configurés par notre environnement. « L’environnement intellectuel » qui configure les croyances fondamentales de notre Primitive Mind est généralement constitué des croyances prédominantes de notre famille et de la communauté plus large dans laquelle nous avons grandi. Au niveau individuel, le Primitive Mind considère ces croyances comme une partie fondamentale de l’identité de sa personne – et donc aussi sacrées que ses bras, ses poumons ou son cœur. Au niveau du groupe, les croyances sont le nœud clé qui relie sa personne à un géant plus grand, ce qui – dans l’ancien monde du Primitive Mind – signifie être en sécurité, avec ceinture et bretelles. Pour des raisons comme celles-là, le Primitive Mind place les croyances dans la même catégorie ultra-critique que les besoins biologiques fondamentaux.

Compte tenu de tout cela, la dernière chose que le Primitive Mind souhaite, c’est que vous vous sentiez humble à propos de vos croyances ou enclin à les réévaluer. Il veut que vous traitiez vos croyances comme des objets sacrés – comme des organes précieux dans votre corps ou des gilets de sauvetages sur une embarcation. Le Primitive Mind traite les croyances comme il traite tout le reste – comme rien de plus qu’un moyen d’atteindre le but singulier de la survie génétique. Pour le Primitive Mind, les bonnes croyances sont celles qui vous laisseront le plus fort sentiment identitaire et qui vous permettront le mieux de vous fondre dans un géant grand et puissant. Une quête de la vérité en évolution constante est directement opposée à ces causes là.

Donc, quand il s’agit de croyances, le Primitive Mind ne veut pas la vérité, il veut la confirmation de vos croyances existantes.

Alors dans quel état ce conflit intérieur nous laisse-t-il tous ? Comme des putains de tarés.

Pour structurer notre petit examen de notre folie collective, divisons le Spectre Psychique en quatre parties :

Nous pouvons faire une approximation de chacun de ces quartiles du Spectre Psychique avec une ligne, ce qui fait de notre carré une Échelle de Réflexion à quatre échelons.

L’Échelle de la Réflexion est mon prisme préféré pour penser à la pensée. Pour tout spectre d’idées donné, vous trouverez des gens sur chacun des quatre quartiles. Les personnes qui se trouvent au même quartile peuvent être en profond désaccord les unes avec les autres sur ce qu’elles pensent – c’est-à-dire qu’elles seront à des positions différentes le long de ce niveau – mais elles auront toutes en commun une façon de penser, animée par une motivation intellectuelle commune, du moins en ce qui concerne le sujet en question. La plupart d’entre nous a l’habitude de mettre les gens dans des cases en fonction de ce qu’ils pensent – de leur position sur un sujet. Notre objectif ici est de mettre en lumière la façon dont les gens pensent et d’apprendre plutôt à catégoriser les gens de cette façon.

Nous allons donc explorer chacun de ces quartiles, en commençant par examiner comment la pensée fonctionne au sommet du Spectre Psychique – où le Higher Mind est 100% aux commandes – puis en descendant les niveaux, jusqu’à ce que nous arrivions aux bas-fonds intellectuels, en bas.

Échelon 1 : Penser comme un Scientifique

 

Voici le Scientifique :

C’est vous quand vous êtes dans les moments où votre Higher Mind est aux manettes de votre pensée. Penser comme un scientifique n’a rien à voir avec votre travail. C’est en rapport avec votre processus de réflexion.

Nous pensons souvent à la science comme l’étude du monde naturel, mais selon Carl Sagan, « La science est une façon de penser bien plus qu’un ensemble de connaissances. »

La science est un mode de pensée. Un moyen de réfléchir. Un processus de réflexion, conçu pour une chose : trouver la vérité.

Lorsque vous êtes en haut du Spectre Psychique, la valeur intellectuelle fondamentale du Higher Mind – la vérité – sera dans la partie supérieure de votre Pile de Valeurs. Et la valeur intellectuelle fondamentale du Primitive Mind – la confirmation de vos croyances existantes – sera en bas. Il est donc purement logique de penser comme un scientifique.

C’est le bon moment pour revenir à notre visuel du clou du Chapitre 4. Tout comme une nation, que nous le réalisions consciemment ou non, chacun d’entre nous a un clou dans l’esprit que nous enfonçons dans nos valeurs sacrées – ces valeurs sur lesquelles nous ne ferons aucun compromis. Toutes les autres valeurs, lorsqu’elles sont en conflit avec les valeurs sacrées, seront obligées de se plier aux bon vouloir des valeurs sacrées. Quand vous pensez comme un scientifique, il y a peu de doute sur l’emplacement du clou.

Les choses sont simples au premier niveau : votre mission intellectuelle est de prendre vos croyances existantes, ou leur absence (Point A) et d’utiliser votre processus de pensée pour aller vers des croyances qui sont un peu plus proches de la vérité (Point B). Vous ne savez pas à quoi ressemble le point B en fin de compte, et quand vous pensez comme un scientifique, vous vous en fichez. Vous voulez juste que votre processus vous amène au point B le plus vrai possible.

Pour les penseurs de ce niveau, la poursuite de la vérité est comme l’ascension d’une montagne infiniment haute à travers un épais brouillard. C’est la poursuite de quelque chose qui ne peut jamais être pleinement réalisé, mais qui peut être approché – et leur but est simplement de continuer à se déplacer vers le haut de la montagne. Ils gravissent la montagne en utilisant leur processus sacré – la méthode scientifique – comme boussole. Ils sont intellectuellement flexibles sur tout, sauf sur le processus lui-même.

Le processus du Scientifique ressemble à ça :

Pour voir comment ça marche, prenez l’un des domaines de votre vie où vous êtes doué pour penser au quartile supérieur, et regardez-vous avancer le long de ce processus vers une conclusion. En commençant par le tout début – Point A.

Point A

Pour les Scientifiques, le point A est presque toujours un « Je ne sais pas » haut et fort. « Je ne sais pas » est le lieu de départ par défaut du penseur du plus haut quartile. Ce n’est pas une chose vraie, c’est juste être honnête et dire : « Je n’ai pas de connaissances là-dessus. » Lorsque vous êtes honnête sur ce que vous savez et ne savez pas, la connaissance et la conviction ne font qu’un, et au point A, vous êtes tout en bas dans ce coin :

Le plus souvent, les Scientifiques ne se donnent pas la peine de courir après la vérité – ils savent qu’avec un temps limité, ils passeront toute leur vie à ne pas savoir pour la plupart des sujets. Mais lorsqu’un Scientifique veut s’éloigner de A et se rapprocher de B sur un sujet, la méthode scientifique est la « procédure nécessaire » non négociable par laquelle les idées doivent passer pour être considérées comme des « connaissances ».2 2

Disons qu’aujourd’hui, vous avez décidé que c’est un de ces moments où vous voulez en apprendre davantage sur un sujet de société pertinent.

Peut-être que vous songez à la société et que vous voulez déterminer ce que vous pensez des retombées économiques, ou que vous décidez qu’il est temps de développer une position originale et bien conduite sur les lois relatives à l’avortement. Peut-être entendez-vous sans cesse parler des écoles privées, des droits de douane, des politiques frontalières ou du contrôle continu à l’école et voulez-vous mieux comprendre cette problématique donnée. Peut-être qu’il y a des élections locales à venir et que vous voulez savoir pour qui voter.

Peut-être que vous pensez à l’histoire et que vous voulez mieux comprendre les causes de la Première Guerre Mondiale, ou peut-être que vous avez lu le journal et que vous voulez savoir pourquoi le Brexit est arrivé et ce que cela signifie pour l’avenir. Peut-être vous demandez-vous simplement à quel point vous devriez avoir peur ou être excité par l’envolée technologique qui se produit tout autour de vous.

Quel que soit le sujet, vous êtes prêt à vous embarquer dans la montagne brumeuse du penseur de haut niveau à la recherche d’un point B le plus vrai possible – donc vous vous lancez vers votre premier objectif :

Formulation d’une hypothèse

Les penseurs de haut niveau forment des hypothèses de bas en haut, en raisonnant à partir de principes premiers. Lorsque vous raisonnez à partir de principes de base, vous faites de votre mieux pour ignorer la sagesse conventionnelle et vos propres idées préconçues, et vous vous concentrez uniquement sur les faits fondamentaux. Vous traitez ces faits essentiels – les « principes premiers » – comme des pièces de puzzle, et en utilisant uniquement ces pièces, vous faites appel à la raison pour tirer une conclusion.

Mais pour faire un puzzle, vous avez besoin de pièces, et au point A, vous ne les avez même pas encore. Obtenir les bonnes pièces et les assembler pour essayer de former une hypothèse est un effort en trois parties, réalisé par ces trois personnages :

Voici comment ils font leur truc :

Formation d’une hypothèse, Composante 1 : Collecte d’informations

Lorsque nous pensons à la façon dont vous formez vos points de vue, on peut imaginer votre tête comme un système en deux parties, avec une porte délimitant chacune d’elle :

Le boulot du Videur de l’Attention est de protéger la porte de l’attention. Chacun de nous est inondé d’informations à tout moment, et nous avons une attention à accorder très limitée. En d’autres termes, votre esprit est un club sélect réservé aux VIP. Alors que vous scrutez le monde qui vous entoure, les informations forment une longue queue devant votre Porte de l’Attention, et votre Videur de l’Attention n’a pas d’autre choix que d’être un enfoiré de videur et de refuser l’entrée à la plupart des gens.

Sauf lorsque vous décidez d’apprendre quelque chose de nouveau et de développer un point de vue sur ce sujet. Quand vous pensez comme un Scientifique, vous savez que vous en savez peu, surtout quand vous êtes au point A. Donc le Videur de l’Attention trie beaucoup moins strictement toute information qui semble potentiellement pertinente sur le sujet.

Comme il s’occupe de la Porte de l’Attention, le Videur de l’Attention ne se soucie pas particulièrement de savoir si les pièces du puzzle sont censées ou précises – il est trop sous-payé pour ça. Il veut simplement faire entrer une grande variété de pièces qui semblent être représentatives du large panel d’idées sur le sujet en question, de tous les points de vues sur le spectre des idées. Il sait que même un point de vue avec lequel vous êtes quasiment sûr d’être en désaccord, qui vient d’une personne que vous êtes presque sûr de ne pas aimer, peut quand même vous apprendre quelque chose. Il se peut que vous ne changiez pas d’avis, mais le fait de connaître la façon dont cette personne pense est une information en soi. À cette étape, même les points de vue que vous savez ridicules sont autorisés à entrer s’ils semblent être représentés de façon proéminente, parce que l’éventail de points de vue qui existent sur le sujet est un point clé de la compréhension de ce sujet.

Bientôt, la partie extérieure de votre esprit – la « zone des considérations » – est remplie de pièces de puzzle impatientes, formant une longue file d’attente à l’extérieur d’un club VIP beaucoup plus sélect – vos croyances.

 

Formation d’une hypothèse, Composante 2 : Évaluation de l’Information

Il y a des cas où la personne qui réfléchit a le temps et les moyens de recueillir de l’information et des preuves directement – avec ses propres observation, ou en menant ses propres études. Dans ces cas, le Videur des Croyances n’a pas grand-chose à faire – vous savez déjà que l’information est fiable, car vous l’avez vue de vos propres yeux.

Mais la grande majorité de l’information que nous utilisons pour nous informer est une connaissance indirecte – une connaissance accumulée par d’autres que nous importons dans notre esprit et que nous adoptons comme la nôtre. Chaque statistique que vous rencontrez, chaque étude que vous lisez, tout ce que vous apprenez dans un manuel scolaire et à l’école, tout ce que vous apprenez de vos parents, chaque livre que vous lisez, tout ce que vous voyez dans les nouvelles, tout ce que vous ingurgitez sur les réseaux sociaux, tout ce que vous entendez des politiciens ou des célébrités, toute hypothèse de sagesse conventionnelle – tout cela est de l’information indirecte.

 

Le travail de votre Videur des Croyances est de décider ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas.

Évaluer la légitimité d’une idée est un travail difficile. Et si le seul moyen de le faire est de vérifier la vérité par vous-même, vous ne gagnez pas beaucoup de temps.

C’est pourquoi la compétence la plus importante d’un penseur avisé est sans-doute d’apprendre à accorder sa confiance.

La confiance, lorsqu’elle est attribuée judicieusement, est une raccourci efficace pour l’acquisition de connaissances. Si vous pouvez faire confiance à une personne qui dit la vérité et que vous acceptez ce qu’elle dit comme étant la vérité, vous prenez les connaissances pour lesquelles elle a travaillé dur – soit par ses propres recherches, soit indirectement, en utilisant ses propres critères de confiance soigneusement conçus – et vous les photocopiez dans votre propre cerveau pour ainsi dire.

Sans confiance, la connaissance est limitée à un minuscule ensemble de données d’expérience personnelle. Foutez Einstein enfant dans une forêt sans aucune information, puis dites-lui d’inventer la meilleure arme possible, et il n’arrivera même pas à s’approcher de l’arc et des flèches. Mais si vous commencez avec Einstein au sommet du gratte-ciel de la connaissance, il pourra vous expliquer comment fonctionne la relativité générale. La communication, plus la confiance, sont des outils intellectuels magiques qui permettent de faire des économies. C’est la raison pour laquelle l’humanité a pu accumuler une quantité de connaissances collectives faramineuse au cours des 10 000 dernières années, qui a permis à une espèce de primates des forêts de comprendre les origines de l’univers.

Mais la confiance, lorsqu’elle est mal utilisée, fait exactement le contraire. Lorsque nous croyons que l’information est vraie alors qu’elle ne l’est pas, nous nous retrouvons avec l’illusion de la connaissance – ce qui est bien pire que de n’avoir aucune connaissance.

Le truc, c’est que presque tout l’apprentissage que vous avez fait dans votre vie s’est écoulé en vous le long d’un canal de confiance présidé par votre Videur des Croyances. Mais ce qui importe beaucoup plus que la quantité de votre apprentissage cumulé, c’est la qualité la légitimité – de ce que vous avez appris. Et la qualité de vos connaissances est fonction de la capacité de votre Videur de Croyance à accorder sa confiance.

D’une certaine façon, l’apprentissage est un peu comme la gestion d’une entreprise et la connaissance est comme l’argent que vous récupérez. Accepter de mauvaises informations en tant que vérité est comme accepter le paiement d’un client avec l’argent du Monopoly sans s’en rendre compte. Vous pouvez bâtir une grande entreprise et travailler dur pendant des décennies pour la diriger, mais si 90% de vos revenus sont constitués de fausse monnaie de Monopoly, vous êtes un homme d’affaires déplorable.

Il est facile de voir que la monnaie du Monopoly est fausse, mais la connaissance du Monopoly ressemble souvent exactement à la vraie connaissance pour un œil non averti, de sorte que notre économie du savoir est actuellement infestée de faux renseignements.

Pour faire ce travail d’une importance capitale, votre Videur des Croyances doit maîtriser l’art du scepticisme.

Le Spectre du Scepticisme

Le but du chercheur de vérité est de se rapprocher le plus possible du point d’équilibre du scepticisme quelque chose que nous pouvons visualiser sur un Spectre de Scepticisme.

Le Spectre de Scepticisme est un filtre dont les paramètres peuvent être ajustés pour rendre le filtre plus strict ou plus lâche. Le point idéal est le réglage optimal du filtre – juste assez serré pour identifier et éliminer systématiquement les conneries ; juste assez ouvert pour laisser entrer la vérité et profiter pleinement de la magie du raccourci de l’adoption de réelle connaissance des autres bientôt devenue la vôtre.

Déplacez-vous à gauche du point d’équilibre du spectre, là où le filtre est plus lâche, et vous commencez à laisser s’infiltrer des grosses conneries dans vos croyances. Si vous vous éloignez encore plus à gauche, vos croyances deviennent un fouillis de mensonges, d’idées fausses et de contradictions. En se déplaçant vers la droite du point d’équilibre, on resserre trop le filtre, comme un propriétaire d’entreprise si inquiet d’accepter accidentellement de l’argent du Monopoly qu’il finit par refuser aussi de l’argent réel. Trop à droite et vous ne croirez plus qu’on est allé sur la Lune

Pour bien manger, vous devez trouver un point d’équilibre dans votre apport alimentaire – si votre « Videur de l’Alimentation » est trop indulgent, vous mangez une tonne de malbouffe, s’il est trop strict vous mourrez de faim. Pour bien penser, c’est pareil. La crédulité et la paranoïa paralysent votre capacité à penser correctement, surtout lorsque vous vous éloignez toujours plus loin du point d’équilibre. Quand vous êtes crédule, les contradictions deviennent un cauchemar. Vous lisez l’Opinion A sur un sujet et vous y croyez, l’adoptant dans vos croyances. Puis vous lisez l’Opinion B, qui dit que l’Opinion A est fausse, et vous êtes convaincu de cela. Avec des points de vue très contradictoires qui se bousculent par-dessus vos croyances, vous finissez par vous retirer, vous sentant tout simplement incapable de comprendre ce sujet. D’un autre côté, quand vous êtes paranoïaque, tout ce que vous entendez est accompagné d’un petit astérisque qui dit, « ne sois pas idiot, ils essaient probablement de te manipuler. » Vous vous empêchez d’ajouter quoi que ce soit à votre banque de connaissances. Dans les deux cas, votre apprentissage stagne.

La crédulité et la paranoïa sont toutes deux le signe d’un manque de confiance dans votre propre jugement sur qui et quoi est digne de confiance. La compétence clé qui vous manque est la capacité de séparer correctement le vrai du faux, de ce qui est  trompeur et totalement incorrect. Si vous ne pouvez pas juger l’information que vous recevez, vous ne pouvez pas profiter de cet outil essentiel : la connaissance indirecte.

Évaluation de l’Échelon : Un Raccourci de la Confiance

Les penseurs efficaces, généralement sans s’en rendre compte consciemment, élaborent un système d’évaluation de confiance à accorder pour leurs amis, pour les journalistes, les politiciens, les médias, les institutions et toute autre source d’information. Comme une note de confiance intellectuelle.

Nous appellerons ce score une Évaluation de l’Échelon, parce que ce qu’ils évaluent vraiment c’est depuis quel échelon de notre Échelle de Réflexion cette source « pense ».

Un bon système d’évaluation de la confiance ajoute encore plus d’efficacité au processus d’acquisition des connaissances, évitant au Videur des Croyances d’avoir à évaluer chaque élément d’information entrant en fonction de ses propres caractéristiques. Nous avons un système interne d’évaluation de confiance dans nos têtes pour la nourriture que nous mangeons. Si vous faites confiance à une certaine épicerie ou marque d’aliments ou à un certain restaurant, vous pouvez gagner du temps en vous épargnant d’étudier soigneusement les ingrédients avant chaque bouchée. L’Évaluation de l’Échelon fonctionne de la même manière.

En plus d’être un moyen efficace de gagner du temps pour acquérir des informations de sources fiables, c’est une astuce qui vous permet aussi d’acquérir de vraies connaissances à partir d’informations moins solides. Si je sais qu’une source particulière, sur le sujet X-Y, a tendance à être carrément en faveur de X et un peu biaisée contre Y, mais qu’elle s’est également montrée raisonnablement soucieuse de la vérité, je peux accepter ses opinions sur X ou Y comme de véritables informations, à condition qu’elles soient prises avec un ajustement adapté. Selon l’ampleur et la direction de leur biais, je peux appliquer juste le bon réglage sur leurs opinions. S’ils disent quelque chose de bien à propos de X, je peux le considérer mais je sais que je dois le vérifier moi-même, puisque leur parti pris historique en faveur de X signifie que ce n’est qu’une déclaration habituelle pour eux. Pareil pour une déclaration négative au sujet de Y. D’autre part, s’ils disent quelque chose de bon au sujet de Y, leur parti pris historique contre Y rend cette information très significative et je peux probablement l’accepter d’emblée.

Pour arriver à quelque chose en tant que penseur, vous devez commencer avec les bonnes pièces de puzzle. Le Videur d’Attention et le Videur des Croyances, grâce à leur travail d’équipe, sont chargés de vous procurer ces pièces. S’ils font leur travail, le super club VIP de vos convictions finit par être peuplé d’un grand nombre d’informations utiles – et vous êtes prêt à vous y perdre.

 

Formation d’une hypothèse, Composante 3 : Élaboration d’une Hypothèse

 

Au centre de la région des croyances de votre esprit, votre Solveur d’Énigme commence à rassembler des informations.

Votre Solveur d’Énigme sait que les deux videurs qui gardent son laboratoire ont fait une tonne d’”écouter les autres”, et son travail consiste maintenant à se couper de tout ce bruit et à construire son puzzle en n’utilisant rien d’autre que la rationalité et les informations déjà présentes dans votre tête.

Lorsque vous raisonnez à partir des principes premiers, vous arriverez souvent à des conclusions qui entrent en conflit avec vos croyances préexistantes ou avec la sagesse conventionnelle. C’est un défi de ne pas perdre confiance en soi et de ne pas renoncer à son processus de pensée dans ces moments-là. Mais un penseur expérimenté sait que même les croyances consensuelles sont souvent fausses, et son Solveur d’Énigme ira de l’avant avec confiance, sachant que dans un monde plein de dogmes et de désinformation, son processus de raisonnement assidu et honnête est un chemin vers la vérité aussi valable que n’importe quel autre.

Les scientifiques, si rigides quant à leur position haute sur l’axe « Comment vous pensez », commencent de façon totalement agnostique quant à leur position horizontale sur l’axe  » Ce que vous pensez ». Au début du processus, un scientifique traite son échelon comme une patinoire, glissant joyeusement d’avant en arrière et faisant faire des pirouettes à leur opinion en explorant différents points de vue possibles.

Mais à mesure que le scientifique apprend et commence à rassembler des informations, il se concentre de plus en plus sur une partie du Spectre des Idées où il soupçonne que la vérité se cache. Leur puzzle prend enfin forme – ils ont commencé à formuler une hypothèse.

C’est un moment passionnant de votre mission aujourd’hui – vous avez conquis la première partie de la méthode scientifique. Vous avez appris une tonne de choses et vous avez formé un point de vue authentique sur le sujet.

Maintenant vient la partie désagréable.

 

Vérification de l’hypothèse

Imaginez que je vous présente ce boxeur.

Et je vous dis

Vous pourriez demander

Si je répondais

Vous demanderiez probablement

Et si je répondrais

On pourrait penser que je suis fou.

Mais les gens font ça avec leurs idées tout le temps. Ils sont sûrs d’avoir raison sur une opinion qu’ils n’ont jamais eu à défendre – une opinion qui n’a jamais été mise sur le ring.

Une croyance ou une opinion que vous n’avez pas testée n’est pas une connaissance, c’est une connaissance en devenir – c’est-à-dire une hypothèse. Une hypothèse est un boxeur avec du potentiel, mais ce n’est pas un champion de quoi que ce soit.

Dans le monde des idées, le marché des idées est le ring de boxe, et les adversaires se présentent sous forme de désaccords

Quand vous pensez comme un scientifique, vous savez qu’il y a des obstacles majeurs entre vous et la vérité. Peu importe la précision de votre système de filtrage d’Évaluation de l’Échelon, on est sûr de se tromper parfois et de laisser des mensonges s’infiltrer dans notre hypothèse. Vous vous méfiez aussi de vos propres préjugés et des biais induits par votre propre vision du monde l’entêtement inévitable de votre propre vision du monde. C’est pourquoi le désaccord est si important pour chaque scientifique. La désaccord est le système immunitaire du chercheur de vérité. Si votre hypothèse est une machine, des choses comme le raisonnement biaisé, la simplification excessive et les statistiques trompeuses en sont les dysfonctionnements et les bugs, et un contestateur fougueux de cette hypothèse est comme un technicien qui en cherche les défauts, ce qui contribue à en faire une meilleure machine. Stuart Mill le dit le mieux :1

Il y a la plus grande différence entre présumer qu’une opinion est vraie, parce qu’à chaque occasion de la contester, elle n’a pas été réfutée – et présumer sa vérité dans le but de ne pas permettre sa réfutation. 3

 

C’est pourquoi un scientifique considère le désaccord comme une autre pièce de puzzle précieuse, essentielle à la réalisation de leur compréhension.

Alors vous retirez votre hypothèse de la sécurité de votre tête 

 

et vous le lancez dans l’arène du marché des idées. Vous commencez à exprimer l’idée publiquement, en personne et sur internet, et vous la regardez se faire critiquer sous tous les angles. Il est temps de voir si le petit gars peut boxer.

Les penseurs du premier échelon ont tendance à s’entourer d’autres penseurs du même niveau – ce qui signifie que trouver des gens avec qui débattre ne posera aucun problème. Lorsque ces penseurs entendent une idée, ils testent par réflexe tous les angles possibles pour la remettre en question. Ne pas d’accord entre eux est un sport.

Alors vous avez juste mis l’idée sur le tapis et regardé les gens affluer pour essayer de la briser.

Parfois, ils réussissent.

D’autres fois, votre idée tient la route.

En observant votre idée sur le ring, vous pouvez mettre en évidence ses défauts, ses idées reçues ou ses points faibles pour vous aider à voir où faire des ajustements. Parfois vous vous engagez dans un débat, jouant le rôle de défenseur de votre idée, argumentant pour sa validité aussi fort que possible.

Parfois, vous vous engagez dans une dialectique, en vous joignant au contestataire pour examiner votre idée.

Vous essayez même parfois de changer de camp et de vous faire l’avocat du diable, en trouvant quelqu’un qui est d’accord avec vous pour débattre avec vous, car le fait de regarder vos conclusions à travers un autre prisme améliore votre clarté et révèle des choses que vous avez ratées.

 

Comme votre hypothèse boxes avec différentes idées contraires, vous regardez chaque match à travers le prisme de ce que vous croyez être l’Évaluation de l’Échelon du contestataire. Vous prenez également en compte le degré de conviction du contestataire, en vous lançant dans ce que l’écrivain Julia Galef décrit comme une « méta-mise à jour » : si vous discutez avec quelqu’un qui a déjà montré que sa conviction tend à être intègre, et que vous êtes tous deux assez sûrs d’avoir raison dans le débat, vous évaluez lequel d’entre vous semble le plus sûr d’avoir raison et vous utilisez cela comme un élément d’information important.

D’autre part, lorsque vous discutez avec une personne qui vous a montré dans le passé que sa conviction exprimée est souvent malhonnête ou délirante, à la manière d’une personne qui crie au loup trop vite, vous ne considérez pas son niveau de certitude comme une information significative.

Plus vous mettez vos hypothèses en pratique sur le ring, plus vous êtes capable d’explorer les limites de vos conclusions et d’affiner votre réflexion pour obtenir des opinions plus précises et plus assurées. Votre hypothèse commence à être sérieusement crédible.

L’arène n’est pas favorable à la plupart des idées, car la plupart des idées sont erronées. Et lorsque votre hypothèse est fausse, un peu de temps dans l’arène à la regarder se faire botter le cul fera baisser la conviction que vous avez et vous convaincra que vous devez retourner à la planche à dessin. Mais les fois où vous arriverez à une hypothèse logiquement solide, complètement fondée sur des faits et philosophiquement cohérente, le marché des idées aura l’effet inverse : en regardant votre idée être un champion encore et encore, vous vous sentirez extrêmement confiant dans votre opinion.

Au fur et à mesure que vous avancez dans ce processus, nous rencontrons une autre compétence importante garder un niveau d’humilité approprié à mesure que votre confiance augmente.

Vous savez, j’ai dit qu’il y a un « point d’équilibre du scepticisme » juste entre la crédulité et la paranoïa où votre scepticisme améliore et n’entrave pas votre capacité d’apprendre ? C’est la même chose pour l’humilité.

Ce point d’équilibre se trouve le long de cette ligne en pointillés :

À tout moment dans votre quête de connaissances, vous voulez que votre opinion soit une expression exacte de ce que vous savez réellement.

Même pour les penseurs les plus conscients d’eux-mêmes, rester en diagonale est plus facile à dire qu’à faire. C’est comme marcher sur une corde raide, et c’est facile de tomber.

Lorsque vous tombez de la corde raide vers le bas, vous vous retrouvez dans la zone d’insécurité.

La zone d’insécurité, c’est lorsque vous oubliez un fait essentiel : que la plupart des gens qui expriment une conviction sont des putains de baratineurs. Quand vous oubliez cela, mais que vous êtes juste assez conscient de vous-même pour ne pas avoir cette même opinion pleine de conneries, vous vous sentez stupide et vous avez honte de vos modestes niveaux de connaissance.

Lorsque vous êtes crédule face à l’opinion des autres – comme un client qui est la proie d’un vendeur de poudre de perlimpinpin – votre opinion tombe en dessous de votre propre niveau de connaissance. En fait, vous savez des choses sur le sujet, mais vous avez l’impression que non. Vous avez un problème de confiance. Plus vous êtes tombé loin sous la corde raide, plus le problème est grand.

Lorsque vous tombez de la corde raide de l’autre côté, vous atterrissez dans la zone d’arrogance.

La zone d’arrogance, c’est quand vous n’êtes pas assez conscient de vous-même pour vous rappeler de vos propres défauts, et que vous oubliez à quel point la connaissance est difficile, et vous vous trompez en croyant que vous en savez plus que vous n’en savez. Plus vous êtes haut sur la corde raide, plus vous racontez de conneries.

Mais jusqu’à présent, dans notre petit voyage, vous avez fait les choses comme un Scientifique. Lorsque vous pensez comme un Scientifique, cela signifie que Higher Mind est aux commandes dans votre tête et qu’il vous éclaire avec lucidité et conscience de soi. Une conscience de soi élevée signifie que lorsque vous vous regardez dans le miroir, vous vous voyez tel que vous êtes – un penseur imparfait avec un potentiel d’apprentissage infini.

Une conscience claire de soi vous aide à garder un œil sur le Primitive Mind et à rester conscient de vos propres pièges cognitifs – parce que vous savez que votre cerveau a été conçu pour la survie, et non pour la vérité, et qu’il est sage de vous méfier de votre propre intuition. En apprenant et en réfléchissant, la conscience de soi vous aide à résister à l’envie de votre cerveau d’économiser l’énergie mentale et de simplifier à l’excès un sujet complexe. Cela vous aide à vous souvenir de penser le long d’un spectre malgré l’instinct de penser en noir et blanc. Cela vous force à analyser des versions légèrement différentes d’idées similaires au lieu de les regrouper parce que c’est plus pratique et de les étiqueter comme une seule chose. Cela vous aide à continuer de faire l’effort de rechercher la nuance. Parce qu’un Scientifique sait que la vérité est toujours enfouie quelque part dans les replis de la nuance, et qu’un point de vue satisfaisant, net et unilatéral est presque toujours faux ou incomplet. Se regarder dans le miroir vous aide à garder un œil sur votre propre Évaluation de l’Échelon pendant que vous réfléchissez.

 

Donc vous arrivez à rester assez près de la corde raide, en travaillant dans cette zone :

Votre petite hypothèse a traversé l’enfer et est sortie de l’autre côté sous forme de connaissance.

Il y a juste une autre chose à faire.

Les penseurs du premier échelon se connaissent eux-mêmes, connaissent leurs pairs et connaissent suffisamment bien l’histoire pour savoir que tout l’intellect humain est faillible. Dans le monde scientifique actuel, même l’hypothèse la plus éprouvée et la plus vraie sera traitée non pas comme une vérité ultime, mais comme une théorie. Les scientifiques atteignent le sommet de la « théorie » parce qu’ils savent que toutes les croyances sont falsifiables et peuvent être prouvées fausses dans notre ère caractérisée par le changement ou par de nouvelles preuves. La pensée fonctionne de la même façon – pour qu’une hypothèse puisse être considérée comme une « connaissance », elle doit survivre à des tests et à un examen continus.

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Si tout cela semble un peu épuisant, c’est parce que ça l’est.

Le processus d’apprentissage du Scientifique est épuisant parce que la connaissance est difficile. Parce que la vérité est difficile. C’est pourquoi les gens qui ont tendance à penser comme des Scientifiques sont plus qu’heureux de dire « je ne sais pas » la plupart du temps. Ils sont paresseux comme tout le monde – ce qui fait d’eux des Scientifiques, ce n’est pas qu’ils soient nécessairement des apprenants obsessionnels, mais qu’ils soient réalistes quant à ce qu’implique l’élaboration de points de vue réels, indépendants et éclairés, et qu’ils soient honnêtes avec eux-mêmes et avec les autres sur ce qu’ils savent et ce qu’ils ne savent pas.

Mais pour aujourd’hui au moins, vous avez fait suffisamment d’efforts pour établir un point de vue solide et indépendant sur lequel vous pouvez avoir confiance – et vous l’avez fait à la manière des Scientifiques.

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J’ai récemment participé à une conférence pour les scientifiques. Je ne suis pas un scientifique, mais je suis une personne curieuse, et j’écris souvent sur la science, alors j’ai passé un super moment à acculer des scientifiques et à les interroger sur des questions que je me suis posées mais auxquelles je n’ai pas pu répondre. 4 5 6 7 J’écris aussi souvent sur la façon dont les scientifiques pensent, et à un moment donné, en me tenant dans un groupe avec environ quatre scientifiques, j’ai parlé de mon admiration pour la façon dont les scientifiques pensent – leur humilité, leurs motivations pures, leur volonté d’admettre qu’ils ont tort lorsque de nouvelles preuves modifient leurs conclusions. 

Ils ont tous éclaté de rire. L’un d’eux a dit : « Avez-vous rencontré des scientifiques ? » 

C’est le problème avec les humains. Nous sommes si mauvais pour penser comme des Scientifiques que même les scientifiques sont mauvais pour penser comme des Scientifiques. Parce que peu importe qui vous êtes, à l’intérieur de votre esprit se trouve une puissante petite boule de poils primitive.

Jusqu’ici, quand vous pensiez comme un Scientifique, les conditions dans votre tête étaient parfaites. Le Higher Mind était aux commandes tandis que le Primitive Mind était en sommeil. Nous sommes tous là parfois, quand nous sommes au mieux de notre forme, quand nous pensons comme des pros.

Mais la vérité est un but fragile. Et à un moment donné, sans que vous vous en rendiez compte, quelque chose change. C’est un peu la situation de la poule et de l’oeuf. Parfois, un sujet auquel vous pensez réveille votre Primitive Mind parce qu’il croit, pour une raison quelconque, qu’il est important pour votre survie de maintenir un certain point de vue sur ce sujet – souvent parce que le sujet est fusionné avec votre identité. Parfois, le Primitive Mind s’est réveillé pour une raison sans rapport, et infiltre votre esprit avec une ou plusieurs de ses émotions standard – la peur, l’orgueil, la colère, l’ego – et cela affecte alors votre pensée, en faisant descendre votre intellect à son niveau.

 

Quelle qu’en soit la cause, lors de notre descente de l’échelle aujourd’hui, le Primitive Mind est entré en scène. Le Higher Mind est toujours le personnage le plus puissant, mais il a maintenant de la concurrence.

L’irruption du Primitive Mind a compromis votre capacité à penser depuis le plus haut niveau – vous êtes descendu à l’échelon 2. Vous ne pensez plus comme un Scientifique, mais comme un fan de sport.

 

Échelon 2 : Penser comme un fan de sport

En mettant de côté les psychopathes, la plupart des amateurs de sport veulent que les matchs qu’ils regardent soient joués équitablement. Ils ne veulent pas d’arbitres corrompus, même si cela aide leur équipe à gagner. Ils veulent que leur équipe gagne à la loyale. Ils accordent une grande importance à l’intégrité du processus en lui-même.

C’est juste… qu’ils veulent vraiment que ce processus donne un certain résultat. Ils ne font pas que regarder le match… Ils sont en train de s’enraciner.

Lorsque votre Primitive Mind commence à s’infiltrer dans votre processus de réflexion, vous commencez à penser de la même façon. Quand vous prenez cette route 

vous croyez toujours que vous commencez au Point A, et vous savez que vous devez travailler dur pour arriver au Point B et vous voulez que le Point B auquel vous arrivez finalement soit la vérité. Mais vous n’êtes pas vraiment objectif.

Il arrive des choses étranges à votre réflexion quand le pure besoin de vérité est infectée par une motivation en arrière-pensée. Les psychologues appellent ça un « raisonnement motivé ». J’aime à l’appeler Réflexion en état de Motivation – l’équivalent de la conduite en état d’ébriété. Sent-ts’an explique :

Si vous voulez que la vérité soit claire devant vous, ne soyez jamais pour ou contre. La lutte entre « pour » et « contre » est la pire maladie de l’esprit. – Sent-ts’an, vers 700 ap. J.-C.

Lorsque vous pensez comme un Fan de Sport, Sent-ts’an, son apostrophe et son trait d’union vous en veulent, parce qu’ils savent ce qu’ils vont voir – le rigoureux processus de pensée du Scientifique, corrompu par l’obstacle le plus traître du chercheur de vérité :

Le biais de confirmation.

Le biais de confirmation, l’une des déficiences les plus courantes causées par la Réflexion en état de Motivation, est la raison pour laquelle les gens voient la perfection dans leurs toutes nouvelles relations amoureuses, et pourquoi les gens sont si souvent dégoûtés par les ex qu’ils adoraient autrefois. C’est pourquoi les personnes paranoïaques paniquent quand quelqu’un prend trop de temps pour répondre à leur message. C’est pourquoi les artistes trop confiants peuvent entendre dix réactions polies sur leurs oeuvres et une réaction démonstrative et voir la seule exception comme une preuve de leur grandeur – et pourquoi d’autres artistes peu sûrs d’eux font exactement le contraire. C’est pourquoi les théoriciens du complot voient des preuves de leurs conspirations partout.

 

Nos lunettes à rayons X nous rappellent ce qui se passe ici : Alors que le Higher Mind se focalise sur l’axe “Comment tu penses” – sur l’intégrité du processus de pensée – le Primitive Mind fait l’inverse : il ne se soucie que de ce que vous pensez – de votre position sur l’axe des x. Parce que les objectifs intellectuels des deux esprits – la vérité et la confirmation – sont en conflit direct, c’est une situation à somme nulle. Lorsque le Primitive Mind entre dans l’équation et saisit un morceau de votre processus de pensée, il éloigne de façon inhérente une partie de votre intégrité loin des principes du Higher Mind. La valeur de confirmation qui monte dans votre Pile de Valeurs signifie aussi que la vérité descend.

Le fait d’abaisser un peu la vérité dans votre Pile de Valeurs la fait sortir de son territoire sacré et planté avec un clou pour l’amener dans une zone importante, mais pas complètement sacrée, où les valeurs sont fixées d’une manière moins solide, par exemple avec une punaise.

En même temps, la confirmation est passée de la zone sans importance de votre Pile de Valeurs – où les valeurs bougent librement, au gré des valeurs les plus importantes au-dessus – au niveau quelque peu important. Les valeurs de ce niveau sont toujours secondaires par rapport aux valeurs plus importantes, mais on leur donne suffisamment de poids pour qu’elles ne se baladent plus aussi librement. Elles sont maintenant scotchées et maintenues place.

Avec un certain effort, les valeurs scotchées peuvent être déplacées, mais il y a maintenant une certaine friction – une résistance au changement d’avis qui n’était pas là quand vous étiez sur l’échelon supérieur. Une partie de votre intégrité intellectuelle a été supplantée par la loyauté intellectuelle.

La vie est simple pour vous lorsque vous n’avez affaire qu’à des valeurs cloués et libres – il y a peu de conflits intérieurs. Les punaises et le ruban adhésif sont plus délicats.

Maintenant, alors que e Higher Mind est en quête de la vérité, le biais de confirmation est la main invisible du Primitive Mind qui oriente le processus dans une direction. Et cette main invisible infecte chaque partie du processus d’acquisition des connaissances.

Le processus de réflexion du Fan de Sport

 

Si vous regardez de loin, le processus de réflexion du Fan de Sport ressemble beaucoup à celui du Scientifique :

Mais en vous regardant faire votre chemin de A à B, nous allons voir qu’un petit Primitive Mind peut provoquer beaucoup de changements.

Dès le début, lorsque vous vous tenez au Point A, sans encore aucune connaissance réelle, l’influence de l’opinion de votre Primitive Mind vous donne l’impression d’en savoir un peu plus que vous n’en savez.

L’étape de la collecte de preuves – que le Scientifique s’est assuré de faire de manière équitable et représentative – devient maintenant une collecte motivée. Le Videur de l’Attention a maintenant ses favoris.

On sait tous ce que c’est quand un videur a ses favoris. Dans ma vingtaine, j’ai eu une bonne dose de folle vie nocturne  – et une expérience courante consistait à faire la queue à l’extérieur d’un bar sombre, bruyant et affreux pendant que des groupes de femmes arrivaient et entraient immédiatement, sans faire la queue. Si j’étais avec un groupe comptant trop d’hommes, on pouvait faire la queue jusqu’à l’entrée pour être finalement refusé.

Lorsque vous pensez comme un Fan de Sport, votre Videur de l’Attention traite les informations qui concordent avec votre opinion actuelle comme un groupe de jeunes femmes attirantes. Et il traite les informations qui affaiblissent vos opinions existantes comme un gros groupe de boloss peu attrayants. Méfiez-vous quand vous laissez votre esprit se transformer en fête du slip, il a ses favoris.

Lorsque le favoritisme se produit dans le domaine des idées, nous appelons cela la picorage ou “cherry-picking” (cueillette des cerises).

Selon Internet, l’origine du terme anglais “cherry-picking” est effectivement liée à la cueillette des cerises. Imaginez que vous êtes une personne très riche qui possède un immense domaine et qu’un jour vous vous ennuyez à mourir, alors vous appelez votre serviteur et vous lui dites que vous aimeriez avoir une idée de ce que donne la récolte des cerises cette année dans votre verger. Mais vous avez faim aussi, alors vous ordonnez au serviteur de ne pas vous dire à quoi ressemblent les cerises, mais de vous apporter un échantillon représentatif des cerises de votre verger.

 

Si vous réfléchissiez au niveau de l’échelon Scientifique, vous laisseriez les instructions telles quelles. Votre serviteur compterait les cerises dans le verger et recueillerait un échantillon comme celui-ci :

Mais si vous réfléchissez à partir de l’échelon de Fan de Sports, vous pourriez ajouter un commentaire supplémentaire en ajoutant l’ordre : « …et ça me contrarirait beaucoup si mes cerises ne passent pas une bonne année. J’ai hâte d’apprendre ce que ça donne. »

Alors, le serviteur se dirige vers le verger avec le même plan – cueillir un échantillon représentatif. Mais avec votre dernier commentaire qui résonne dans ses oreilles, il se retrouve à ne pas vraiment compter les cerises mais à les jauger à vue d’oeil. Et quand il choisit son échantillon, il ressort comme ça :

En tant que penseur du 2ème échelon, vous voulez toujours savoir ce qui se passe réellement dans le monde – vous ne faites qu’orienter un peu les résultats. Et c’est ce que vous avez fait ici dans la phase de collecte d’informations, avec votre Videur de l’Attention comme serviteur. Vous n’avez pas vraiment dit au videur d’être malhonnête à propos de quoi que ce soit – vous l’avez juste mis dans une position délicate en lui fournissant des motivations contradictoires : 1) de vous donner un échantillon représentatif, et 2) d’espérer que les résultats sortent d’une certaine façon. Ainsi, l’information que vous finissez par recueillir et absorber sur le sujet s’oriente légèrement et  amicalement vers votre conclusion privilégiée.

Pendant que cela se passe, vous n’êtes pas conscient de faire quoi que ce soit de bizarre. Vous croyez toujours que vous pensez comme un bon Scientifique – même si quelque part au fond de vous, vous vous sentez peut-être un peu à l’aise avec vous-même sans savoir pourquoi.

Et alors que nous passons de la collecte d’information à l’évaluation de l’information, les problèmes continuent – parce que lorsque vous pensez comme un Fan de Sport, le Videur des Croyances commence à agir bizarrement aussi.

 

Lorsqu’on lui présente une idée qui confirme vos croyances existantes, il devient plus laxiste, en assouplissant les critères du filtre de confiance et laissant plus facilement entrer les gens.

Mais lorsqu’une preuve ne semble pas correspondre à l’idée favorite de votre Primitive Mind, le bénéfice du doute disparaît et le Videur des Croyances cherche n’importe quelle raison de refuser l’entrée.

Nous avons parlé du problème d’être soit trop crédule, soit trop paranoïaque – mais à ce moment là, nous parlions de chercheurs de vérité authentiques qui n’étaient tout simplement pas sûrs de leur jugement intellectuel. Basculer sur l’Indicateur du Scepticisme, en fonction du contenu évalué, est un scepticisme motivé – une forme classique de Réflexion en état de Motivation.

Jonathan Haidt, psychologue social et professeur à l’Université de New York, résume bien le scepticisme motivé : [footnote2]Source[/footnote2]

On ne regarde pas le monde en se disant : « Où sont les éléments de preuve ? » On commence par une supposition originale et on dit : « Puis-je le croire ? » Si je veux croire quelque chose, je demande : Puis-je le croire ? Puis-je en trouver la justification ? Mais si je ne veux pas y croire, je dis : Dois-je le croire ? Suis-je obligé de le croire ? Ou je peux m’échapper ?

« Puis-je y croire ? » n’est pas une crédulité accidentelle, mais une crédulité motivée. De même, « dois-je le croire ? » est une paranoïa motivée.

Haidt poursuit en citant un exemple parfait de scepticisme motivé en action :

Dans une étude classique, les étudiants viennent dans le laboratoire. Ils suivent des cours de psychologie, ils apprennent des méthodes expérimentales, donc on leur donne une étude. Ça à l’air de venir du Journal de la Science. On leur demande d’en critiquer les méthodes. Et l’étude semble montrer que la consommation de caféine est associée au cancer du sein. Et leur travail consiste maintenant à lire l’étude et à dire ce qu’ils pensent des méthodes.

Eh bien, à votre avis qui trouve beaucoup de défauts dans cette étude ? Qui ? Les buveurs de café ! Et vous pensez que tous les buveurs de café essaient de trouver des failles dans l’étude ? Les femmes qui boivent du café disent désespérément :  » Dois-je le croire ? Dois-je le croire ? Qu’est qui pourrait être erroné ? », et elles trouvent toutes sortes de choses qui ne vont pas. Les autres disent : « Oh mon Dieu, ok, je ne savais pas ça. »

Réflexion en état de Motivation, a amené les personnes les plus contrariées par les résultats de l’étude à raisonner différemment, et avec moins de précision, que le reste des participants – parce que cela change littéralement ce qui se passe dans notre cerveau. Une étude du MIT a utilisé des données réelles d’IRM (imagerie par résonance magnétique fonctionnelle) pour voir ce qui se passait avec le raisonnement motivé, et ils ont constaté que « le raisonnement motivé est qualitativement distinct du raisonnement lorsque les gens n’ont pas d’intérêt émotionnel important dans les conclusions auxquelles ils arrivent ».[footnote2]MIT Press Journals: Neural Bases of Motivated Reasoning: An fMRI Study of Emotional Constraints on Partisan Political Judgment in the 2004 U.S. Presidential Election[/footnote2] Un peu comme la façon dont la conduite en état d’ébriété est qualitativement distincte de la conduite sobre.

Nous pourrions également revenir à l’histoire du tabagisme aux États-Unis dont nous avons parlé dans la deuxième partie et constater le même phénomène. Une chose que je n’ai pas mentionné, c’est qu’à mesure que le pays se rendait compte que le tabagisme est mauvais pour la santé, personne ne s’est rendu compte plus lentement que les fumeurs.[footnote2]Source: Gallup[/footnote2]

Quand je vois ces statistiques, je visualise ça.

Les fumeurs étaient des fans de l’équipe sportive « Fumer c’est ok » – ce qui a réduit leur capacité à atteindre la vérité aussi rapidement que ceux qui n’avaient pas d’intérêt dans cette histoire.

Mais ni les fumeurs ni les buveuses de café ne pensaient à tout cela. Comme un conducteur ivre qui est quasiment sûr de pouvoir conduire, ils ont supposé qu’ils étaient objectifs. Ce raisonnement motivé est sournois en partie parce que le penseur ne se rend même pas compte que cela se produit.

Le même préjugé modifie la façon dont vous jugez les sources d’information. Ça fonctionne un peu comme les trains parallèles. Si vous êtes dans un train et que vous regardez par la fenêtre un autre train et que les deux trains sont immobiles, vous voyez l’autre train comme étant immobile.

Si l’autre train commence alors à avancer à 10 km/h, il vous apparaît comme s’il avançait vraiment à 10 km/h.

Mais si votre train avance à 10 km/h, alors l’autre train, qui avance également à 10 km/h, vous semble immobile.

Et si l’autre train s’arrête de bouger et s’arrête, il vous semble qu’il a commencé à reculer à 10 km/h.

Les humains avec des préjugés fonctionnent comme des trains en marche. Quand vous pensez clairement et objectivement, comme un Scientifique, vous êtes comme un train à l’arrêt. Vous voyez l’objectivité et les préjugés des autres penseurs pour ce qu’ils sont. Mais quand vous voyez à travers un prisme biaisé, vous êtes comme un train en mouvement. Une personne qui partage votre biais vous semble objective, tandis qu’une personne objective vous semble avoir un biais dans l’autre sens. Et lorsque vous rencontrez quelqu’un qui est en fait biaisé dans l’autre sens, vous verrez son biais comme étant plus extrême qu’il ne l’est.

Le mouvement de votre propre biais fausse votre système d’Évaluation de l’Échelon. Au lieu de juger les penseurs ou les sources d’information uniquement par la force de leur processus intellectuel, vous allez inconsciemment gonfler la note des sources qui sont d’accord avec vous et diminuer votre note de celles qui ne le sont pas. Encore du  raisonnement motivé – cette fois sous la forme d’un jugement motivé.

Cette distorsion de l’Évaluation de l’Échelon fonctionne de pair avec le basculement sur l’Indicateur du Scepticisme.

Un Videur de l’Attention corrompu conduit à une image déformée de la réalité, et un Videur des Croyances corrompu signifie un système immunitaire intellectuel affaibli contre les mensonges. Ainsi, lorsque nous nous dirigeons vers la troisième étape du processus de « formation d’hypothèses », c’est-à-dire la formulation d’une hypothèse, nous trouvons une salle de croyances alimentée par un processus corrompu. Le personnage clé de cette pièce – le Solveur d’Énigme – est limité aux pièces qu’on lui a données pour faire son puzzle, et lorsque vous pensez comme un Fan de Sport, un nombre disproportionné de ces pièces appuiera vos points de vue existants.

 

Et ce n’est que la moitié du problème, car la motivation du Primitive Mind a infiltré le processus de toutes les parties de votre esprit – y compris le Solveur d’Énigme lui-même. Pendant qu’il fait son puzzle, il plane quelque part dans sa vision périphérique une image de votre point de vue existant – celui que votre Primitive Mind veut tant confirmer – et le Solveur d’Énigme est un peu plus enclin à utiliser les pièces qui correspondent à cette image.

Au moment où vous arrivez à votre hypothèse finale, elle ressemble confortablement et de façon prévisible, à ce que vous soupçonniez/espériez être vrai à l’époque où vous étiez au point A.

Lorsque vous passez à la dernière étape du processus de connaissance – tester votre hypothèse – votre biais de Fan de Sport continue de se manifester.

Lorsque vous pensiez comme un Scientifique, vous ne ressentiez que très peu d’attachement pour votre hypothèse. Mais maintenant, en regardant votre petite machine, vous là regardez en tant que fan. Vous portez son maillot. C’est votre gars sur le ring. Et s’il gagne un débat, vous pourriez même vous surprendre à penser « on a gagné » – un terme classique dans le monde des vrais fans de sport qui révèle l’enchevêtrement de leur identité avec celle de leur équipe.

Vous agissez bizarrement parce que lorsque vous pensez comme un Fan de Sport, vous ne voyez pas le désaccord comme une pièce de puzzle utile – mais comme une balle de tennis qui vient vers vous pendant un match de tennis. Quelque chose à frapper en retour, un défi à relever pour essayer de gagner.

Et quand on analyse ce qui se passe pendant le match de boxe, il y a encore plus de jugement motivé. Lorsque votre hypothèse reçoit un bon coup de poing, vous êtes susceptible de le voir comme un coup bas ou un swing chanceux ou quelque chose d’autre qui n’est pas vraiment légal. Et lorsque votre hypothèse donne un coup, vous pouvez avoir tendance à surestimer son ampleur ou le niveau de compétence qu’il implique. Lorsque le match est terminé, vous finissez généralement par avoir l’impression que votre hypothèse a passé le test haut la main – même dans les cas où un observateur objectif verrait la situation dans l’autre sens.

A la fin de tout cela, il n’est pas surprenant de se retrouver au Point B qui brille.

Votre route vers le point B était plus facile cette fois. Et même si vous avez appris un peu moins pour y arriver que lorsque vous étiez un Scientifique, vous vous sentez un peu plus confiant dans vos croyances qu’au départ.

La suite de biais de confirmation de votre Primitive Mind vous a amené au-dessus de la zone d’humilité, dans la Zone d’Arrogance. Même si en réalité, vous êtes moins bon en tant que penseur efficace, lorsque vous vous regardez dans le miroir, vous voyez un meilleur penseur que le Scientifique a vu à travers son miroir.

Comme je l’ai dit, un petit Primitive Mind peut avoir un grand impact.

Mais les Fans de Sport ne sont pas sans espoir. Le Higher Mind a toujours l’avantage dans l’esprit du Fan de Sport, c’est pourquoi le Fan de Sport, aussi motivé soit-il, se donne encore beaucoup de mal pour essayer de passer par toutes les étapes du processus de pensée. Le Fan de Sport comprend que la méthode scientifique est incroyablement importante – ils ne sont tout simplement pas doués pour la mettre en œuvre efficacement.

Mais le Higher Mind sera là, portant sa voix de remise en question avec ténacité dans la tête du Fan de Sport, et au moins une partie du temps, le Fan de Sport pourra reconnaître qu’il a tort à contrecœur. En regardant leur équipe favorite jouer, l’œil d’un vrai fan de sport peut être biaisé, mais quand un ralenti montre clairement que l’équipe adverse était dans ses limites, ils admettront à reculons que c’était la bonne décision – en fin de compte, si le désaccord est assez fort, les opinions du Fan de Sport peuvent changer. Au fond, le moment venu, c’est l’intégrité du jeu qui compte le plus pour le Fan de Sport – car sous la brume des préjugés cognitifs, les Fans de Sport sont toujours de vrais penseurs.

C’est pourquoi beaucoup de Fans de Sport finissent par suivre un chemin de type Dunning-Kruger, où le Higher Mind finit par prévaloir et le Fan de Sport commence à penser davantage comme un Scientifique.

Quand les scientifiques avec qui j’ai parlé à cette conférence ont ri et m’ont demandé : « Avez-vous rencontré des scientifiques ? » Je pense qu’ils faisaient probablement référence au fait que les scientifiques, comme presque tous les bons penseurs, descendent souvent d’un échelon et pensent comme des Fans de Sport. Les Fans de Sport sont des Scientifiques imparfaits – des Scientifiques qui, au moins à un moment donné ou sur un sujet particulier, sont tombés du wagon de la pensée et ont laissé leur Primitive Mind prendre le dessus. L’essentiel est que lorsque les penseurs de l’échelon 1 sont biaisés, ils optent généralement pour l’échelon 2 – mais probablement pas beaucoup plus bas.

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En descendant l’échelle à partir d’ici, rappelons-nous que même si nous utilisons des échelons distincts pour simplifier les choses, nous travaillons vraiment sur un spectre.

Quand vous êtes juste en dessous de l’échelon Scientifique, vous êtes juste un peu un Fan de Sport. Oui, vous avez commencé à raisonner en étant motivé, mais vous n’avez bu que quelques verres au bar de la motivation et votre Higher Mind est toujours en contrôle quasi-total.

Mais à mesure que vous descendez le long du Spectre Psychique, l’influence du Primitive Mind devient de plus en plus importante. Vos pieds deviennent plus collants sur l’axe des x, car il devient de plus en plus difficile pour les preuves contestataires, même les plus solides, de faire bouger vos croyances. À mesure que la fumée qui obscurcit votre raison s’épaissit, votre conscience de vous-même s’émousse. Votre Niveau de Motivation Super Saiyan augmente de plus en plus à mesure que la vérité et la confirmation se rapprochent l’une de l’autre dans votre Pile de Valeurs.

 

Finalement, vous passez le point médian.

C’est un grand moment. Parce qu’à partir de maintenant, le Primitive Mind est le personnage le plus puissant dans votre esprit.

Et lorsque le Primitive Mind devient le caractère alpha, la confirmation devient plus importante pour vous que la vérité.

Que vous l’admettiez ou non (vous ne l’admettrez pas), le désir de se sentir bien, et de paraître bien, a dépassé votre désir de vérité. Et quand une autre motivation dépasse votre désir de vérité, vous quittez le monde de l’intégrité, de la rationalité, de la réalité, et vous entrez dans un nouvel endroit – un endroit que j’appelle :

La Terre des Convaincus est un grand pays couvert d’herbe verte, de ciel bleu et rempli d’un groupe de personnes dont les croyances ne peuvent être influencées par aucune preuve. Lorsque les gens sont là, ils croient ce qu’ils croient non pas pour des raisons indépendantes, mais parce qu’ils sont disciples d’une lignée de pensée – une religion, une idéologie politique, une sous-culture – ou peut-être qu’ils s’accrochent simplement aux conclusions de leur moi précédent, à l’époque où ce moi était un vrai penseur. De toute façon, vous pouvez discuter avec eux autant que vous voulez, mais vous n’obtiendrez rien, car leurs opinions ne sont pas modifiables. C’est pour ça qu’ils vivent ici.

Même si l’axe vertical est un spectre lisse, la ligne médiane est un point clé le long de celui-ci. Après l’avoir franchie, ce que vous pensez est maintenant plus important pour vous que la façon dont vous pensez.

Lorsque votre pensée descend de l’Échelon 2 à l’Échelon 3, vous êtes passé d’un fan de sport à un penseur d’un tout autre genre.

 

Échelon 3 : Penser comme un Avocat

Un Avocat et un Fan de Sport ont beaucoup en commun. Ils ont tous deux un point B préféré, tout en conservant un certain niveau de dévouement à la flèche qui est censée les y conduire. Ils sont tous deux en conflit entre les valeurs de vérité et de confirmation. La différence essentielle est de savoir quelle valeur, au fond, est la plus élevée dans leur Pile de Valeurs.

Un Fan de Sport veut gagner, mais poussé dans ses retranchements, il se soucie finalement plus du fair-play que de la victoire.

Le travail d’un Avocat est de gagner, et peu importe à quel point vous le poussez, rien ne peut altérer leur loyauté. Parce que est-ce c’est déjà arrivé ça ?

Non. Ça n’est jamais arrivé.

Parce qu’un Avocat est dans une équipe, point final. 

Ce qui veut dire que si le Fan de Sport commence au point A et essaie quand même d’orienter la flèche dans une certaine direction, quand vous pensez comme un Avocat, vous ne commencez pas du tout au point A.

 

Vous commencez au point B.

Lorsque vous pensez comme un Avocat, la faible voix du Higher Mind dans votre tête signifie que vous ressentirez toujours le besoin d’avoir une flèche qui mène à Votre Idée – mais au lieu que le Point B soit la variable dépendant de la flèche, la variable indépendante, votre processus soumet la flèche au bon vouloir du Point B. Vous vous efforcerez d’assembler une flèche qui mène exactement là où vous voulez qu’elle arrive.

C’est comme ça que les avocats du monde réel pensent, n’est-ce pas ? Ils décident de s’occuper d’une affaire, ou ils sont affectés à une affaire, et dès le premier instant où ils y réfléchissent, ils connaissent déjà leur position générale – et c’est là qu’ils resteront, peu importe ce que dit leur raisonnement ou les preuves.

Le client n’est pas coupable. Maintenant, découvrons pourquoi.

À partir de  là, ils font preuve de diligence raisonnable, choisissent les preuves et les assemblent de manière à pouvoir présenter au jury une flèche qui semble être un chemin objectif vers le point B de leur camp.

C’est l’heure de l’avertissement « Je ne critique pas les vrais avocats » !

Le truc avec les avocats du monde réel, c’est que dans une vraie salle d’audience, la façon de penser de l’avocat est logique – parce que le dossier de l’avocat n’est que la moitié de ce qui sera présenté au jury. L’avocat de la partie adverse présente une flèche inverse qui mène au point B opposé. Cela complète le tableau, permettant au jury de décider laquelle des deux flèches semble la plus légitime et lequel des points B semble le plus vrai. De cette façon, le processus judiciaire met en place un marché miniature d’idées, où des idées opposées peuvent s’affronter et où la vérité (espérons-le) émergera lorsque la poussière sera retombée.

C’est pourquoi mes nombreuses critiques à l’égard de la manière de penser de l’Avocat sur notre échelle ne sont pas des critiques à l’égard des avocats du monde réel. Les avocats du monde réel savent qu’ils sont la moitié d’un système à deux avocats, et ils savent que la meilleure façon pour ce système de produire la vérité est qu’ils fassent le meilleur plaidoyer possible pour une seule version de l’histoire.

Le problème pour vous lorsque vous pensez comme un Avocat est que vous ne le faites pas comme la moitié d’un tableau complet, dans le but de jouer votre rôle dans un processus de recherche de la vérité – vous le faites comme un penseur tellement défectueux que les arguments gagnants sont devenus plus importants pour vous que la vérité. Alors qu’une salle d’audience à deux avocats est un excellent mécanisme de recherche de la vérité, une salle d’audience où il n’y a qu’un seul avocat est terrible pour trouver la vérité – et quand vous pensez comme un Avocat, votre tête ressemble plutôt à ce dernier type de salle d’audience.

Formulation d’une hypothèse, style Avocat

Avant même qu’un apprentissage ait commencé, votre point de départ ne ressemble en rien à ce qu’il était lorsque vous pensiez comme un Scientifique. La voix du Higher Mind étant maintenant marginalisée, son humble « je ne sais pas » est à peine audible, tandis que le « bien sûr que je sais » plus important du Primitive Mind résonne au centre de votre esprit.

Et à mesure que vous progressez dans le processus d’apprentissage, vous traitez vos croyances existantes non pas comme une expérimentation révisable, ou même comme votre équipe sportive favorite, mais comme votre client. Le Scientifique est le chef de leur processus de réflexion, mais maintenant, vous travaillez pour vos croyances.

Travailler pour vos croyances signifie que vous ne raisonnez pas objectivement et que vous n’êtes même pas en Réflexion en état de Motivation – c’est plus sérieux que cela. Vous êtes en Réflexion en état d’Obligation.

Lorsque  êtes en Réflexion en état d’Obligation, les trois personnages qui composent votre processus de raisonnement sont comme des associés d’un cabinet qui travaillent sur votre dossier et dont le seul travail est d’aider à bâtir le dossier qui vous permettra de rester au point B où vous avez commencé et, idéalement, de renforcer votre conviction à ce sujet.

Votre Videur de l’Attention a mis à jour les instructions : n’importez que des perspectives, des statistiques, des anecdotes et des opinions qui aident à confirmer le Point B. Peu importe comment se déroule la saison des cerises, vous ne voulez voir qu’une seule chose : un panier rempli de cerises mûres et éclatantes. Votre Videur de l’Attention n’a plus besoin de réfléchir ou de faire des efforts pour vous fournir des informations – vous lui avez carrément rendu la vie facile.

Le picorage style Avocats explique pourquoi il y a tant de situations où les parties opposées d’un débat peuvent, simultanément, être absolument sûres d’avoir raison. Lorsque vous êtes assez bas sur l’échelle “Comment tu penses”, vous cessez d’être conscient du fait que le picorage même existe, alors pour vous, il semble clair que toutes les preuves montrent que j’ai raison. On voit ça partout. Comme, par exemple, deux médias idéologiquement opposées présentant exactement la même nouvelle mais picorent et sélectionnent des informations totalement différentes à présenter, ainsi les parties présentées comme des héros et des méchants, victimes et responsables, sont littéralement inversées dans leurs récits.

Il y a aussi beaucoup d’exemples moins marqués. Vous voulez croire que le café, le vin, le chocolat, les gras saturés ou la viande rouge sont sains ? Tapez juste dans Google le nom de cet aliment, avec « étonnamment sain ». Le picorage vous couvre. Vous voulez croire qu’ils sont tous mauvais pour vous ? Demandez à Google s’ils sont « nocifs » ou « malsains » à manger. Dans tous les cas, vous sortirez de votre recherche encore plus sûr de ce que vous êtes venu chercher. 

Votre Videur de l’Attention est également moins déterminé à collecter les pièces de puzzle des principes premiers qu’il ne l’était sur les échelons supérieurs et plus satisfait de récupérer des arguments préemballés sous forme d’éditoriaux et autres opinions externes. Lorsque vous cherchez avant tout une confirmation, rien n’est plus efficace qu’une information sous forme de « voici pourquoi vous avez raison ».

La nouvelle mission de votre Videur des Croyances est tout aussi facile. Lorsqu’il évalue quelles informations sont valides, au lieu de la tâche super difficile de vérifier la véracité des cartes d’identités, il n’a plus qu’à vérifier le contenu des cartes d’identités.

Lorsqu’une information importée s’accorde avec ce que vous croyez déjà, le videur ouvre la porte en grand.

Les informations qui suggèrent que vous pourriez vous tromper sont considérées comme malveillantes et manipulées et sont systématiquement exclues par un filtre de scepticisme si serré que rien ne pourrait jamais passer au travers.

Nous avons un mot pour cela : le déni.

Lorsque votre Videur des Croyances juge des sources d’information, son travail est tout aussi simple. Quand vous pensez que vous connaissez déjà la vérité, alors par définition, quelqu’un qui est d’accord avec vous a raison et quelqu’un qui ne l’est pas a tort. Au lieu de demander, « Comment en sont-ils arrivés à cette idée ? » votre Videur Des croyances demande maintenant simplement : « Il sont cons ou bien ?”

Dans un « mouvement de biais » aussi rapide, quiconque est en désaccord avec vous, objectif ou partial, vous apparaît comme un très mauvais penseur. Un signe évident que vous pensez comme un Avocat est lorsque vous croyez – croyez vraiment, dans votre cœur – que les gens qui ne sont pas d’accord avec vous ont non seulement tort, mais qu’ils ont tort aussi à cause de ce qu’ils sont – des penseurs fondamentalement mauvais – même si vous avez mis un effort relativement faible pour apprendre à les connaître.

Lorsque vous pensez comme un Avocat et que vous êtes en Réflexion en état d’Obligation, votre système immunitaire à deux videurs est totalement désactivé. Vos croyances finissent par être remplies d’une combinaison d’informations réelles et d’argent de Monopoly pourri – et vous n’avez plus la capacité de distinguer l’un de l’autre.

La bonne nouvelle, c’est que ce n’est pas important. Savoir ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas importe seulement lorsque vous essayez réellement d’atteindre la vérité – et votre objectif est maintenant passé à la confirmation. Donc, au centre de votre esprit, votre Solveur d’Énigme se met au travail. La conclusion préférée à la périphérie de la conscience du Fan de Sport a maintenant été déplacée au milieu, et votre Solveur d’Énigme l’utilise comme guide, comme l’image sur le couvercle de la boîte d’un puzzle.

Là où les Scientifiques doivent peindre minutieusement, les Avocats peuvent tracer sans réfléchir.

Souvent, l’activité principale de votre Solveur d’Énigme c’est juste de mémoriser. Plutôt que de se concentrer sur les principes premiers bruts, les videurs ont importé la plupart des arguments de seconde main des autres, et les mémoriser vous donnera l’impression d’acquérir des connaissances. Vous adoptez simplement comme point de vue les arguments les plus légitimes des autres qui sont d’accord avec vous, et vous êtes prêt à partir.

Lorsque vous décidez d’approfondir un peu plus et de tirer vos propres conclusions, votre processus d’Avocat vous fait découvrir toutes sortes de tours de passe-passe astucieux concernant les tendances et les anecdotes, la corrélation et la causalité, les statistiques formulées en douce, et plus encore (nous aborderons tout cela dans les chapitres suivants).

Si quelqu’un veut vraiment croire à peu près n‘importe quoi – que la Terre est plate, que le 11 septembre a été orchestré par les Américains, que tout le monde les déteste, que tout le monde les aime, que la CIA est après eux – le cerveau humain n’aura aucun problème à utiliser la grande boîte à outils des astuces d’Avocats pour faire en sorte que cette croyance semble parfaitement claire et irréfutable.

 

Lorsque vous pensez comme un Avocat, l’étape de la Formation d’Hypothèse n’est en fait qu’un processus de renforcement des croyances. Vous vous retrouvez inévitablement avec les mêmes points de vue avec lesquels vous avez commencé, maintenant renforcés par un ensemble de faits et d’arguments à jour qui vous rappellent à quel point vous avez raison. Vous avez construit une flèche qui fait l’affaire.

Tester votre hypothèse, style Avocat

Dans la phase de test, bien que vous soyez beaucoup moins enclin à chercher des contestataires pour remettre en cause vos croyances, votre flèche fabriquée vers le point B vous rend prêt à discuter avec quiconque tente de briser votre conviction. Vous êtes prêt pour la phase de test, car vous savez que vous êtes invincible.

Votre argumentaire n’a rien à craindre, car pour que le désaccord suscite le doute, vous devez écouter et prendre en considération la contestation de façon réfléchie – et vous ne ferez ni l’un ni l’autre. Pour chaque argument qui se présente à vous, vous n’en écouterez juste assez pour uniquement choisir dans votre arsenal le meilleur argument pour le contrer. Habituellement, vous réciterez simplement les paroles d’un des articles d’opinion que vous avez assimilés. Si quelqu’un vient vers vous avec un argument auquel vous ne semblez pas pouvoir répondre, vous allez encore une fois faire appel à votre arsenal de sales tours.

Votre refus d’écouter ou de prendre en considération les propos d’un contestataire, ajouté à votre main pleine d’atouts et à votre conviction inébranlable que vous avez raison, fera de vous une personne absolument exaspérante avec laquelle débattre. Vos adversaires auront l’impression de se battre contre un mur de briques, et à la fin, il sera clair pour eux que rien de ce qu’ils auraient pu dire – rien du tout – n’aurait pu vous faire dire « hmm c’est un bon point – je dois y réfléchir – peut-être que j’ai tort ». C’est ce qu’on ressent quand on se dispute avec quelqu’un qui vit dans la Terre des Convaincus.

Le Scientifique regarde sa boîte à idées comme un spectateur objectif. Le Fan de Sport la regarde avec un intérêt certain. L’Avocat regarde les matchs de boxe depuis le milieu du ring, comme un arbitre corrompu ayant fixé le résultat du match dès le début.

Revenons un instant sur notre méthode scientifique d’acquisition des connaissances.

 

Les penseurs du premier échelon passent par ce processus ardu parce qu’ils savent que la connaissance est difficile à acquérir. Lorsque vous pensez comme un Avocat, tout ce processus est une farce – une formalité pour apaiser la faible voix Higher Mind qui implore votre esprit. Votre processus de connaissance n’a jamais eu la chance de vous faire changer d’avis, et il n’a jamais eu la chance de vous faire accumuler beaucoup de connaissances réelles.

Il vous a seulement amené sur ce chemin :

Mais ce qui est fou chez les humains, c’est que quand on pense comme un Avocat, on croit encore qu’on pense comme un scientifique. Vous pensez que vous avez fait ça :

Vous êtes sûr que la conviction considérable à laquelle vous êtes parvenu est bien méritée. Vous pensez que votre esprit est rempli de points de vue originaux basés sur des connaissances réelles et solides. Vous sortez de ces débats et de ces matchs truqués en croyant que vous avez écrasé l’adversaire. Si vous recevez un argument frustrant, vous l’attribuez probablement, ironiquement, au fait que votre adversaire est un mur de brique avec lequel il est impossible d’argumenter, et le genre de personne qui ne peut tout simplement pas admettre qu’elle a tort. 8 

C’est le pouvoir de l’illusion humaine. Un exploit délirant de cette ampleur – qui vous laisse rempli d’un niveau de conviction que vous n’avez absolument aucun motif de ressentir – est généralement un effort d’équipe entre deux types d’illusion :

1) Une vision déformée de vous-même. Lorsque vous vous regardez dans le miroir, au lieu de voir un penseur dramatiquement défectueux, l’épaisse fumée du Primitive Mind vous montre un intellectuel modèle.

2) Une vision déformée du monde. Lorsque vous avez l’esprit clair et que vous pensez comme un Scientifique, vous savez que le monde et les gens qui le composent sont incroyablement complexes, nuancés et confus. Ce fait vous permet de rester humble par rapport à ce que vous savez, peu importe ce que vous avez appris. Mais lorsque vous pensez comme un Avocat, le même brouillard qui vous empêche de prendre conscience de vous-même déforme également votre vision du monde qui vous entoure. Alors que la vision claire du Scientifique leur montre un monde complexe et brumeux, la vision brumeuse de l’Avocat leur montre un monde simple, plein de lignes nettes et de distinctions en noir et blanc. Pendant que votre intellect descend l’échelle, les spectres aux contours plus que flous s’aiguisent en distinctions binaires nettes, et les individus uniques se classent en groupes facilement stéréotypés. Les problématiques ont maintenant un bon et un mauvais côté, avec peu de terrain d’entente possible. Les gens sont bons ou mauvais, bien intentionnés ou malveillants, et c’est tout. La simplification excessive est la marque de fabrique du penseur amateur.

L’arrogance, c’est l’ignorance plus la conviction. C’est un combo particulièrement mortel car il vous empêche de vous améliorer. Non seulement il vous laisse sans véritable connaissance, mais il vous prive de l’humilité nécessaire pour acquérir de vraies connaissances ou devenir un meilleur penseur. Lorsque vous pensez que vous vous en sortez déjà très bien, vous avez l’impression qu’il n’y a plus de place pour l’amélioration. Nous accumulons tous des expériences de vie, mais nous n’en tirons pas tous avantage. Alors que l’humilité est un filtre perméable qui absorbe l’expérience de la vie et la convertit en connaissance et en sagesse, l’arrogance est un bouclier de caoutchouc sur lequel l’expérience de la vie rebondit tout simplement.

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Si l’on peut  dire quelque chose sur l’échelon 3, les penseurs de style Avocat, c’est qu’ils comprennent au moins le concept de la flèche. Il est impossible de les faire changer d’avis, mais ils ne sont pas si loin – à une « poussée de croissance » intellectuelle – de devenir un penseur légitime. Quelque part dans la périphérie de leur esprit, la voix du Higher Mind a encore un certain poids. Et s’ils peuvent juste apprendre à l’écouter et à l’apprécier, peut-être qu’ils pourront changer.

Mais encore une fois, nous travaillons sur un spectre ici, donc la protubérance du Higher Mind dans la tête d’un Avocat varie en taille. L’échelle « Comment tu penses » fonctionne un peu comme le congrès américain. C’est une situation binaire où le « parti » qui a la majorité est au volant. A n’importe quel point du spectre, soit le Higher Mind, soit le Primitive Mind détient le contrôle principal, tout cela étant déterminé par le fait que vous êtes en dessous ou au-dessus du point médian de l’échelle. Mais comme pour le congrès, la marge de victoire compte. Lorsque vous pensez comme un Avocat, le Primitive Mind est le parti majoritaire – mais le Higher Mind est une minorité importante qui exerce encore une influence. Mais à mesure que votre intellect descend plus bas dans le Spectre Psychique, s’enfonce plus profondément dans la Terre des Convaincus, la voix du Higher Mind s’affaiblit. Le Primitive Mind commence à développer une super-majorité, laissant finalement le parti minoritaire du Higher Mind avec peu ou pas d’influence.

En descendant, vous devenez un Avocat de plus en plus corrompu, de plus en plus susceptible d’accepter des cerises en plastique peintes en rouge – des fakes news, des statistiques de mauvaise qualité, des expériences personnelles anecdotiques non représentatives – comme preuves solides et vérité universelle. Vous commencez à prendre les choses hors contexte ou même à mentir carrément quand vous vous argumentez avec les gens. Et moins s’exposer à ceux qui ne sont pas d’accord avec vous signifie qu’il devient plus facile de ficeler vos adversaires en tant que personnes avec lesquelles ça ne vaut même pas la peine de parler, vous rendant encore plus certain que tout ce que vous croyez est correct. En même temps, l’image que vous avez de vous-même et la certitude que vous avez en vos croyances se renforcent toujours plus. Vous ne vous préoccupez plus du raisonnement qui sous-tend vos points de vue – vous savez simplement que ces points de vue sont justes.

 

Finalement, votre Pile de Valeurs ressemble à ceci :

La confirmation ayant atteint la partie sacrée de la pile, votre clou est de retour, tandis que la vérité se balance maintenant dessous.

Votre pensée se base maintenant entièrement sur les anciens logiciels de votre Primitive Mind, avec le Higher Mind rationnel, raisonnable, humble et conscient de lui-même complètement hors du tableau.

Vous avez atteint le dernier échelon.

 

Échelon 4 : Penser comme un Fanatique

Nous pensons tous comme des Fanatiques par moments. Nous sommes tous naïfs à notre façon, et la pensée fanatique est parfois un exemple de naïveté. Parfois, nos parents ou nos amis nous apprennent à penser comme des fanatiques. Parfois nous avons peur et le fanatisme est une grotte dans laquelle nous avons trouvé refuge.

Je pense que c’est souvent parce que nous avons fait l’erreur d’amateur de penser que les gens sont des idées et que les idées sont des gens. Si les idées et les personnes sont la même chose, cela lie notre valeur personnelle à la valeur de nos croyances. Cela scelle notre sécurité personnelle à la protection de nos croyances et cela fait en sorte que sentir ses croyances menacés est équivalent à se sentir en danger physique. Cela fait en sorte que la validation de nos croyances se traduit par l’acceptation, l’approbation et l’amour. C’est l’un des nombreux fossés dans lesquelles nous tombons lorsque nos Primitive Mind font notre travail de réflexion.

 

Lorsque vous oubliez que les gens et les idées sont séparés, tout votre processus de pensée est chargé d’un fardeau paralysant : protéger vos croyances comme vous protégez votre corps. Vous avez vendu la flexibilité horizontale du Scientifique qui laisse toute la place au compromis sur l’axe vertical, et vous avez échangé la rigidité du Scientifique sur l’axe vertical qui assure que le processus de réflexion reste sur la première ligne contre une rigidité horizontale qui vous cloue au Spectre des Idées pile là où votre opinion se trouve.

Il n’y a plus d’humble Point A. Quand on pense comme un Fanatique, l’humilité est toute faible et honteuse. Vous ne direz jamais « Je ne sais pas », parce que ça revient au même pour vous que de dire « Je ne sais pas qui je suis ». Vous le savez. Vos croyances sont un reflet solide comme le roc de la vérité objective, point. La connaissance est l’opposé, c’est comme savoir que le ciel est bleu. Quiconque a un esprit et un cœur sait ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas.

Donc vous n’avez pas besoin d’une flèche « processus de pensée ». Les flèches sont pour les idiots. Voilà ce que c’est de penser comme un Fanatique.

 

En réalité, vous avez considérez un ensemble d’idées comme sacré, et vous avez abandonné une voie de recherche de la vérité indépendante afin de servir fidèlement ces idées sacrées. Sans qu’aucune influence du Higher Mind ne vous force à vous engager dans un processus de connaissance quelconque, la méthode scientifique autrefois rigoureuse a évolué vers cela :

Penser, pour vous, est une question d’adoration, pas d’apprentissage.

Donc, à part un plaisir profond que vous tirez de l’information qui loue et confirme ce que vous pensez déjà, la collecte d’information a peu d’utilité – vous savez déjà que toutes vos cerises sont parfaites, donc votre serviteur du Videur de l’Attention peut rester chez lui.

Votre Videur des Croyances n’a pas grand chose à faire non plus. Les idées qui valident vos idées sont de bonnes et vraies idées, exprimées par des personnes bonnes et raisonnables. Et ce sont les seules idées que vous voulez entendre.

 

Les trois personnages de votre processus de raisonnement qui vous aidaient autrefois à trouver la vérité envoient maintenant simplement un flot sans fin d’amour, d’acceptation, d’approbation et de sécurité sous forme d’anecdotes, de statistiques et d’opinions qui vous font vous sentir bien.

Dans la phase de test des idées – ah en fait, il n’y a pas de phase de test des idées. Tout d’abord, pourquoi tester ce dont vous êtes déjà sûr ? C’est comme tester si l’océan est humide. Mais plus important encore, lorsque vous pensez que les idées et les gens sont les mêmes, quelqu’un qui conteste vos idées devient une insulte. C’est violent. C’est une attaque personnelle. C’est une menace. Si les Scientifiques voient le désaccord comme une pièce de puzzle et les Fans de Sport comme une balle de tennis, les Fanatiques voient a contradiction comme un seau rempli de merde.

Et qui veut remettre en question vos idées de toute façon ? Des contestataires. Les contestataires sont des gens qui ont des idées différentes, ce qui signifie qu’ils sont des gens différents – le pire des types des personnes. Leur existence entière, si elle est acceptée, invalide votre propre existence. Ils ne peuvent donc pas être tolérés. Vous évitez autant que possible les contestataires et leurs idées dégoûtantes autant que possible – à part les moments que vous passez à vous moquer d’eux et de leurs idées, ce qui n’est qu’une autre forme d’auto-confirmation.

Au sommet de notre échelle, votre identité était celle d’un humble apprenant, ce qui vous rendait intellectuellement solide. Les matchs de boxe intellectuels étaient comme un ami – ils vous rendaient plus intelligent et vous rapprochaient un peu plus de la vérité. Maintenant que vous pensez comme un Fanatique, ces idées dans le ring sont comme votre corps nu et vulnérable – vous ne voulez donc pas regarder vos idées, ou les encourager, ou même les réparer. Vous interdisez complètement la boxe.

Quand on pense comme un Fanatique, il n’y a pas de processus de réflexion, car il n’y a pas de raisonnement. Vous êtes juste là, toujours là :

Vous êtes l’image même de l’arrogance, de la conviction non méritée, de l’ignorance totale, de l’inconscience totale. Et sous cette façade se cache une fragilité terrifiante, protégée seulement par un ensemble rigide et pourtant fragile de croyances simplifiées. Ce n’est pas une super situation.

C’était donc notre échelle. Il est temps de faire un grand tableau récapitulatif ( click droit sur l’image et « ouvrir dans un nouvel onglet » pour pouvoir zoomer ) :

Chacun de nous est un travail en cours, et en vieillissant, nous pouvons aussi grandir psychologiquement. Plus nous évoluons psychologiquement, plus nous passons de temps à penser à partir des échelons supérieurs et moins nous passons de temps en bas. Mais peu importe à quel point nous sommes doués pour la réflexion, je suis presque sûr que nous ne pourrons jamais nous débarrasser totalement de la pensée du bas de l’échelle.

Ce billet est entièrement consacré à la pensée individuelle, mais la vie intellectuelle d’un individu ne se déroule pas de manière isolée. Le tableau en deux dimensions que nous avons peint jusqu’à présent dans ce post est encore incomplet. C’est une coupe transversale en 2D de ce qui est en fait un système en 3 dimensions – une simple tranche de brioche dans la brioche du comportement humain. Pour que notre objectif soit rempli, nous devrons faire un zoom arrière et regarder plus profondément dans cette brioche du comportement humain, en explorant la façon dont la pensée intervient dans les communautés. Dans le prochain chapitre, nous entrerons dans le monde merveilleux et à la fois horrible des cultures intellectuelles.


  1. Même pendant le TED !

  2. J'ai failli mettre une image du mec de Dos Equis ici et de faire apparaître dans une bulle "Je n'essaie pas toujours de formuler des conclusions, mais quand je le fais, je préfère la méthode scientifique". Mais je savais que ma femme mettrait son veto lorsqu'elle ferait sa relecture, alors j'ai laissé tomber.

  3. Une autre chouette citation  de Stuart Mill : “Celui qui connaît seulement sa vision des choses en sait peu. Ses arguments peuvent être bons et peut-être que personne ne pourra les réfuter. Mais il est également incapable de réfuter les arguments de l’opposition, s’il n’en fait pas un peu pour mieux les connaître, il n’a aucun fondement pour préférer une opinion ou l’autre … Et il n’est pas non plus suffisant d’entendre les arguments adverses de la part de ses professeurs, présentés comme il le font, accompagnés de réfutations. Il doit être capable de les entendre de la part de personnes qui les croient effectivement … il doit en prendre connaissance dans leur forme la plus plausible et convaincante”.

  4. Pour exemple pour savoir si dans le cas où deux couples décident, à la place d’avoir leur propre enfant, d’avoir un enfant joint - avec chaque couple créant un embryon et ensuite en “faisant se reproduire” les deux embryons dans un laboratoire en extrayant une gamète de chacun d’eux puis en utilisant ces deux gamètes pour concevoir “l’enfant” de ces deux embryons. Ensuite, ils implanterait cet embryon    dans une des deux femmes et quand elle a cet enfant, c’est en fait le petit fils ou la petite fille des deux couples. Donc ces quatres personnes auraient effectivement produit un enfant à 4 parents qui est également lié à chacun d’entre eux. Puis, en suivant mon imagination, 30 ans après, quand les deux couples seraient dans leur soixantaine, et leur petit fils ou petite fille dans leur trentaine, ils pourraient récupérer les deux embryons congelés et leur donner vie. Et alors vous auriez les couples dans la soixantaine, leur enfant dans la trentaine, et dans ses bras elle tiendrais deux bébés - ses parents. Et l’enfant des deux couples. J’imagine quelques années plus tard, en donnant à manger aux enfants, faisant, “Eh Maman - ne frappe pas Papa. Tu dois attendre pour manger, tu ne dois pas prendre sa nourriture. Et ça continue. 30 ans plus tard, les deux parent ont maintenant 30 ans, et eux se marient et ont un enfant. Et quand Thanksgiving arrive, vous avez les deux couples d’origines - maintenant qui ont 90 ans, leur enfants de 30 ans, qui sont marié et leur petits enfants, qui ont 60 ans et 3 mois respectivement. C’est pour ça que j’ai sollicité la mondialement reconnue chercheuse sur les cellules souches, pour la questionner là-dessus.

  5. La réponse est oui, techniquement, cela pourrait arriver. Si quelqu’un veut se joindre à ma femme et moi, faites le moi savoir.

  6. J’ai inventé une nouvelle activité : la procrastination des notes explicatives.

  7. A plus

  8. Il y a des moments où nous sommes en train de douter de ce que nous savons et où nous argumentons vers l’extérieur comme un Avocat, pour sauver les apparences. C’est un cas  différent - plus comme un penseur du premier échelon qui, embarrassé, dit juste “Je ne sais pas”. L’Avocat dont on parle n’a pas ce genre de conscience de soi.

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